2022.5.1
Monstre-gardien de tombe ; zhenmushou ; 镇墓兽
Monstre-gardien de tombe
époque Tang
H. 87, L. 38, E. 30
La statue représente une créature hybride, à corps de lion doté d’ailes et de quatre pattes à sabots fendus, ici assise sur un piédestal figurant un rocher, les pattes antérieures fermement campées sur la base. Non glaçurée mais conservant des traces de polychromie, sa gueule féroce aux traits humanoïdes, menton barbu et canines supérieures proéminentes, avec des yeux exorbités, est encadrée par de larges oreilles et est surmontée de cornes et de crêtes flammées, signes de sa nature redoutable. On observe également une crête dorsale.L’œuvre est composée de plusieurs parties qui ont été moulées puis assemblées avant cuisson. La tête et les crêtes portaient une polychromie posée à froid dont il reste des traces. Le reste de la statue est revêtue d'une glaçure "trois couleurs" (sancai 三彩) caractéristique de ce type de production durant la dynastie Tang (618-907). Bon état.
Le monstre pose un réel problème de représentation puisqu’il n’existe pas. La solution choisie pour donner forme à cette bête « surnaturelle » est de fusionner des éléments observés dans la nature. Ce processus d’hybridation donne une consistance ancrée dans le réel à la créature tout en lui accordant une caution monstrueuse. Composés d’éléments provenant de différents animaux (lion, cerf, oiseau, cheval, dragon), les zhenmushou sont dotés de la force de chaque élément, ce qui leur confère un pouvoir surnaturel dans la lutte contre les mauvais esprits.
Chine (lieu de création), Chine (lieu d'exécution), Chine (lieu d'utilisation)
L'introduction d’animaux gardiens en terre cuite dans les corpus funéraires a commencé en Chine sous la dynastie des Wei du Nord (386-534) et s'est poursuivie jusqu’à la fin de la dynastie Tang (618-907). Ces gardiens prenaient la forme de créatures hybrides fantastiques, combinaisons de chiens, de lions et d'autres animaux féroces, et étaient placés dans la tombe, à l’entrée de la chambre funéraire, par paires (l’un aux traits humains, l’autre à tête de bête), pour éloigner tout être ou esprit malveillant qui menaçait de s'immiscer, afin de garantir le repos du défunt.
propriété du département, achat en vente publique, Alpes-Maritimes, musée départemental des arts asiatiques
2022/12/16 (acquis)
Christie's Paris, Art d'Asie, 16 décembre 2022, lot 92. Avec Spink & Son Ltd, Londres, 25 Avril 1980. Ader Picard Tajan, Paris, 25-26 Février 1980, lot 3.
Le British Museum possède dans ses collections une statue (n° d’inv. 1936.1012.220) comparable à l’exemplaire du musée. Elle appartient à un ensemble de 13 mingqi comprenant deux Esprits, deux lokopala (gardiens), deux officiers civils, deux chevaux, deux chameaux et trois serviteurs, daté de 728, provenant de la tombe du général Liu Tingxun à Luoyang. (https://www.britishmuseum.org/collection/object/A_1936-1012-220) Le Metropolitan Museum possède dans ses collection une statue (n° d'inv. 11.83.4) comparable à l'exemplaire du musée. (https://www.metmuseum.org/art/collection/search/49197)
Adrien Bossard, « Gardiens de tombe en Chine : donner forme à l’informe », in Julien Rousseau, Stéphane du Mesnildot (dir.), Enfers et fantômes en Asie, Paris : Flammarion, musée du Quai Branly – Jacques Chirac, 2018, p. 242-249. Danielle Elisseeff, Hybrides chinois, la quête de tous les possibles, Paris : Hazan, 2011, 214 p. Mary H. Fong, « Tomb-Guardian Figurines : Their Evolution and Iconography », dans George Kuwayama (Éd.), Ancient Mortuary Traditions of China, Los Angeles : Far Eastern Art Council, 1991, p. 84-105. Michael Loewe, « Man and Beast : The Hybrid in Early Chinese Art and Literature », Numen, vol. 25, Fasc. 2, août 1978, p. 97-117. Alfred Salmony, « Antler and Tongue : An Essay on Ancient Chinese Symbolism and its Implications », Artibus Asiae. Supplementum, vol. 13, 1954, p. 1-57. David Ake Sensabaugh, « Gardians of the Tomb », Yale University Art Gallery Bulletin, 2001, p. 56-65. Wu Jinjin, Étude sur les zhenmushou de l’époque Tang, thèse de doctorat, 1988, 149 p.