Génie civil ; édifice du génie civil ; gare
Hall des voyageurs et tour d'horloge de la gare SNCF
Auvergne-Rhône-Alpes ; Puy-de-Dôme (63) ; Clermont-Ferrand ; avenue de l'Union Soviétique
Union Soviétique (avenue de l')
20e siècle
20e siècle
1937 ; 1941
La décision de moderniser la gare des voyageurs de Clermont-Ferrand fut prise semble-t-il en février 1935. Le bâtiment existant, mis en service 80 ans plus tôt (le premier train était entré en gare le 7 mai 1855), ne répondait plus au besoin d’une ville dont le nombre d’habitants avait quasiment triplé (38 160 résidants en 1856, 101 128 en 1936). En l’état des connaissances, la chronologie de l’opération demeure imprécise. Le chantier débuta par la construction d’une longue passerelle au-dessus des voies (septembre 1935 – août 1936). Elle relia le bâtiment des voyageurs et les quais à l’avenue Anatole-France (au sud-est de la gare). La halle en métal et verre qui couvrait les quais fut démontée. Des auvents en béton armé la remplacèrent. La reconstruction du hall des pas perdus et l’élévation de la tour de l’horloge commencèrent vers 1937. Ralentis par la guerre, ces travaux ne furent achevés qu’en 1942. La campagne de modernisation se termina au lendemain du conflit par la réhabilitation des deux corps de bâtiment situés de part et d’autre du hall des pas perdus.
Le bâtiment se situe au nord-est du centre-ville de Clermont-Ferrand, à environ 800 mètres du cœur urbain médiéval. Au milieu du XIXe siècle, la désignation du site d’implantation de cet équipement fit l’objet d’un long débat. À la suite du choix définitif, plusieurs avenues furent percées pour le relier à la ville. La gare s’élève parallèlement à l’avenue de l’Union Soviétique (anciennement du Château Rouge, orientée nord-est/sud-ouest). Les avenues Charras et Albert-Élisabeth convergent vers elle en venant de l’ouest. Pour l’essentiel, le bâtiment des voyageurs date de 1853-1855. Il possède un plan en « U » très ouvert dessinant l’un des côtés d’une vaste esplanade. Sur l’axe de symétrie du « U » se trouve le hall des pas perdus. De chaque côté se développe symétriquement une aile plus basse puis un pavillon en retour d’équerre. Le pavillon central, de plan rectangulaire, possédait à l’origine deux niveaux (hall des pas perdus en rez-de-chaussée, appartements à l’étage). En façade principale, un portique à cinq arcades supportait une terrasse accessible depuis l’étage. Un édicule à horloge soulignait l’axe de symétrie. La reconstruction dirigée par Paul Peirani se servit du soubassement de ce pavillon central. En plan, le nouveau hall des pas perdus s’étendit sur toute l’emprise de l’ancien bâtiment, du portique à la façade opposée donnant sur les voies. En élévation, son unique volume emplit toute la hauteur occupée précédemment par le rez-de-chaussée, l’étage et le toit en croupe. La tour d’horloge, accolée à l’angle sud du hall des pas perdus, s’élève à plus de 21 mètres de hauteur. De plan carré, elle a pris place devant l’une des travées de l’aile sud-ouest. Pour unifier l’ensemble du côté de l’esplanade, les façades nord-ouest des deux ailes basses furent modifiées. À l’origine, un large avant-toit supporté par des colonnes en fonte ménageait un passage couvert prolongeant le portique. Il fut remplacé de part et d’autre du hall des pas perdus par deux auvents en béton armé translucide. Un crépi masqua l’alternance des matériaux employés (brique et pierre ou briques de deux couleurs différentes). La volumétrie du bâtiment abritant le hall des pas perdu est extrêmement simple : un parallélépipède bien proportionné dominé par les moulures rectangulaires d’une corniche peu saillante. La façade principale est symétrique : ses cinq travées ont repris le rythme des travées de l’ancien édifice. Six piliers à pans coupés forment des piédroits qui montent du sol jusqu’au linteau des baies. Ce dernier est souligné par le fin relief d’un bandeau. Cinq grandes portes donnent accès au hall. Elles sont protégées par un large auvent en béton translucide. Au-dessus du auvent, cinq hautes baies rectangulaires éclairent l’intérieur. Chacune est divisée en trois parties verticales et égales par deux fins piliers. La tour d’horloge est un haut parallélépipède agrémenté de décrochements : en façade nordouest une avancée, au sommet un volume s’apparentant à un bandeau d’attique. Les arrêtes sommitales sont soulignées par de petites corniches rectangulaires. Une étroite baie cernée d’un réglet perce chacune des élévations, sauf au sud-est. Côté esplanade, au-dessus de l’avancée, quatre minces piliers de plan triangulaire créent un accent. Ils encadrent trois petites baies. Enfin, au nord-ouest et au sud-est se trouvent les cadrans de l’horloge : ils sont ainsi bien visibles des deux côtés principaux de la gare. Toutes les parties des élévations sont revêtues de dalles de pierre (à l’exception des auvents) : granit du Mayet-de-Montagne pour la plinthe en façade principale, pierre ocre clair veinée de gris partout ailleurs. Les joints des dalles sont alignés horizontalement et verticalement afin de montrer leur caractère de revêtement. L’ossature du bâtiment (construit en béton armé avec remplissage de pierre, de briques et de parpaings) n’apparaît quasiment pas à l’extérieur. En revanche, à l’intérieur du hall des pas perdus, les piliers et les poutres de l’ossature en béton armé sont très visibles. Ils divisent le plafond et les murs nord-ouest et sud-est en sept travées. Face aux cinq grandes baies de la façade principale s’ouvrent cinq portes donnant accès aux quais, et au-dessus cinq fenêtres carrées. Les élévations intérieures sud-est et nord-est sont régulièrement rythmées par trois piliers. Elles sont percées d’ouvertures qui permettent de gagner les espaces situés dans les ailes basses (guichets, bureau de presse, brasserie).
La gare SNCF de Clermont-Ferrand se distingue d’abord par ses caractéristiques urbaines et monumentales. Mise en scène par un large parvis, elle bénéficie de vues lointaines grâce aux perspectives créées par les avenues qui convergent vers elle. Ses volumes sont bien proportionnés et d’une grande pureté de lignes. Le style Art déco de la tour d’horloge se conjugue sans rupture avec le Classicisme moderne du hall des pas perdus. L’un et l’autre se fondent sur la grammaire du classicisme, notamment pour l’équilibre des verticales et des horizontales et pour l’importance de la symétrie. La gare était un équipement important, tant pour la compagnie nationale des chemins de fer que pour la ville dont elle constituait une porte très fréquentée. L’édifice devait donc exprimer ces identités par sa monumentalité. Il avait l’obligation d’être à la fois fonctionnel et moderne, à l’image du moyen de transport, tout en plaisant aux voyageurs. L’exemple de la gare du Havre, reconstruite en 1931-1932 par le célèbre architecte Henri Pacon, semble avoir largement influencé Paul Peirani. Le volume du bâtiment du hall, la présence de cinq grandes baies perçant la façade principale, la silhouette de la tour d’horloge sont autant de similitudes entre la gare du Havre et celle de Clermont-Ferrand. La comparaison est flatteuse, puisque par ses qualités architecturales, la gare du Havre bénéficia de plusieurs articles dans les revues d’architecture de l’époque. Néanmoins, la gare du Havre fut en partie détruite par des bombardements en 1944. Au contraire, celle de Clermont-Ferrand n’a subi jusqu’à nos jours aucun dommage. Son intérêt patrimonial en est donc accru, notamment comme témoin de l’architecture des quelques grandes gares françaises réédifiées dans l’Entre-deux-guerres.
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2020
Dossier individuel