Architecture religieuse ; édifice religieux ; édifice religieux chrétien
Temple protestant – Centre cultuel Renée-de-France
Centre-Val de Loire ; Loiret (45) ; Montargis ; 7 villa Belle-Vue
Belle-Vue (villa) 7
20e siècle
20e siècle
1970 ; 1972
L’Église réformée de Montargis, membre depuis 1906 de la Fédération protestante de France, forte d’une importante et active communauté, souhaite à la fin des années 1960 se doter d’un centre cultuel qui comprendrait un temple, un presbytère et des salles de réunions. Le temple, alors situé rue du Général-Leclerc, est vétuste et trop exigu. La ville de Montargis cède à cet effet à l’association cultuelle une parcelle pentue en partie située sur le terrain du château, suite à l’expropriation de son ancien lieu de culte, qui avait été acheté en viager en 1952. C’est l’architecte local Jacques Lesage qui est chargé de concevoir l’édifice et le permis de construire est délivré en 1967, mais il faut attendre 1970 pour que les travaux débutent et 1972 pour qu’ils soient achevés. Le temps de la construction, la municipalité a mis à disposition de la communauté une salle située rue de la Sirène. Le centre cultuel prend le nom de Renée de France, fille de Louis XII et d’Anne de Bretagne, morte au château de Montargis et qui fut une fervente protestante. C’est à la protection accordée par cette princesse à de nombreux réfugiés protestants pendant les guerres de Religion que la ville de Montargis doit la présence d’une communauté réformée en son sein.
Le Centre cultuel Renée-de-France est situé dans le centre de Montargis, au nord du château, au flanc de la colline et aux abords d’un lotissement. Il comprend deux bâtiments distincts, reliés entre eux par une galerie couverte : au sud le temple, au nord le bâtiment du presbytère. Les deux bâtiments sont parallèles mais le temple se trouve plus en retrait vers l’ouest. Le bâtiment communautaire affiche un plan général rectangulaire pourvu d’un sous-sol, de deux niveaux supérieurs et couvert d’un toit-terrasse. Le sous-sol se trouve en rez-de-jardin côté nord du fait du dénivelé du terrain. Il est percé au nord de baies rectangulaires de dimensions variées dont l’une, englobant les deux niveaux supérieurs, dévoile l’emplacement de l’escalier. La façade orientale est percée à chaque étage d’une baie carrée et d’une porte-fenêtre ouvrant sur une loggia. L’élévation sud présente également des baies carrées ainsi qu’une porte ouvrant sur la galerie qui relie le bâtiment au temple. Le temple, qui s’inscrit dans le mouvement expressionniste, consiste en cinq tétraèdres identiques et emboîtés les uns dans les autres, formant ainsi un plan général à ressauts et une élévations à cinq pointes. Entre chaque tétraèdre, le pignon mitoyen laisse apparaître un bardage de bois et des baies en bandeau soulignant les larges pans de toiture d’ardoise. Celle-ci recouvre complètement le temple et vient s’appuyer sur les murs de béton du niveau inférieur qui contient quant à lui les salles communautaires. La façade principale, orientée à l’est, consiste en un pignon triangulaire, mur de vitraux dont les trumeaux en saillie forment une composition géométrique dense mêlant carrés et rectangles verts, jaunes, rouges et bleus. Ces vitraux sont en polycarbonate, les trumeaux les plus importants sont métalliques et peints couleur bois, les autres sont en bois. Ce triangle de vitraux repose sur le mur du rez-de-jardin apparaissant en légère saillie et percé de quatre portes-fenêtres à impostes vitrées. Ces portes donnent accès à une grande salle paroissiale et, au fond, à un petit théâtre. On accède au temple par la terrasse couverte, surmontant la galerie, qui, à l’ouest, se trouve en rez-de-jardin. On entre dans un sas puis dans un hall à la gauche duquel un escalier conduit au niveau inférieur tandis qu’à droite il est entièrement ouvert sur le temple. Celui-ci est formé de l’intégralité du volume sous charpente dont les pans sont lambrissés et dont les baies en bandeau forment des triangles parallèles et lumineux. La salle baigne de lumière grâce à ces baies et à la grande verrière orientale.
Le Centre cultuel Renée-de-France est un témoin privilégié de l’architecture religieuse des Trente Glorieuses et de la rupture radicale qui s’opère alors avec les formes traditionnelles. Alors même que les architectes apportent des réponses aux prescriptions du concile Vatican II qui modernise l’Église catholique, cet édifice nous montre que l’Église réformée de France a elle aussi la volonté de renouveler la conception de ses lieux de cultes et de les inscrire pleinement dans leur époque par l’emploi de nouveaux matériaux – ici des vitraux en polycarbonate – et par des formes et structures innovantes. Le bâtiment accueillant le temple et les salles de réunions dispose d’un plan insolite, de vastes couvertures formant les côtés de l’édifice d’une imposante verrière, traitée comme un véritable objet sculptural. On peut d’ailleurs apparenter ce travail de Jacques Lesage à l’église du Saint-Esprit de Dublin, créée par Richard T. King en 1965, qui utilise également une imbrication de volumes tétraédriques, ou, plus tardivement, à l’église Sainte-Jeanne-d’Arc de Rouen, édifiée par Louis Arretche en 1979, dont les toitures d’ardoise sont aussi l’élément structurel principal. En outre, le Centre cultuel Renée-de-France, par sa polyvalence et la multiplicité de ses espaces – salles de réunion et de réception, théâtre, bureaux, logements – manifeste le souhait de la communauté de se pourvoir d’un lieu de vie autant que d’un lieu de culte. On retrouve de fait dans cette création de Lesage, le même principe d’organisation que les églises catholiques dites à tiroirs, apparaissant à la fin des années 1960 et dotées, en plus du lieu de culte, de divers équipements et espaces destinés aux activités communautaires.
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