Urbanisme et espaces aménagés ; secteur urbain ; secteur urbain concerté ; lotissement
La Maurelette
Provence-Alpes-Côte d'Azur ; Bouches-du-Rhône (13) ; Marseille 15e Arrondissement ; 193 boulevard Simon Bolivar
Simon-Bolivar (boulevard) 193
20e siècle
20e siècle
1962 ; 1964
Même si les Z.U.P. ont remplacé les grands ensembles succédant aux cités dortoirs, la question de la qualité de la vie dans les grands ensembles reste au centre des questions d’urbanisme dans la France des années soixante. Une des réponses va être la conception de projets par des équipes pluridisciplinaires. La Caisse des dépôts avait développé une pluridisciplinarité technique, les ingénieurs tenant le haut du pavé, les Comités Interprofessionnels du Logement, collecteurs du 1 % logement des entreprises feront des enquêtes sur leur parc-logement et leurs locataires pour éviter de certaines déconvenues. C’est dans cet esprit que l’agence Chirié va engager l’étude de la Maurelette sur des terrains très humanisés. La bastide de la Maurelette se trouve entre des bastides prestigieuses et d’égale importance comme Saint Joseph, La Delorme, qui ont façonné tout un paysage de jardins. Cette dimension paysagère induira l’appel à un paysagiste pour l’étude et l’implantation des projets sur le site. Au-delà de ces qualités architecturales, le projet représente une expérience de travail d’équipe sous la conduite d’un maître d’ouvrage, et d’architectes ouverts aux apports de différentes disciplines autres que celles purement techniques : sociologie, paysage, ambiances visuelles. Ce n’est qu’en en 1963 que les architectes acquièrent le droit créer des associations avec des confrères et d’autres professionnels dans l’acte de bâtir.
Pour décrire leur projet, les auteurs font références à des situations existantes ; ils rapprochent la succession de patios des places urbaines et les comparent les unes aux autres. Ainsi, un des plan établit des parallèles entre la place de Lenche, le parvis de l’Opéra, la place Montyon, ou la place de la Bourse, et le projet. La référence urbaine est présente dans le discours et le projet s’éloigne des abstractions compositionnelles du moment. En fait, dans une compréhension du logement qui reste productiviste, l’idée est d’améliorer les démarches de conception pour en éviter des erreurs. La sociologie est utilisée comme enquêtrice susceptible de mieux faire connaître les habitants et leurs demandes en matière de logements. Au résultat, la bastide sera conservée avec allées d’arbres, terrasses et bassins, dessinant une silhouette depuis l’autoroute. Un programme de maison de la culture et des loisirs lui sera dédié par la suite. Pour le reste, on a affaire à une unité de voisinage réussie qui articule logements et équipements, paysage et constructions. À la juxtaposition de blocs, de tours et de barres, est opposé un tissu continu qui délimite une dizaine de vides successifs, places ou patios, et forme une sorte de dédale lié au cheminement des piétons, rigoureusement séparé des voitures. L’influence du Team X est frappante, notamment celle de Candilis, Woods et Josic à la Viste. Le tissu continu intègre les tours qui émergent de la silhouette générale de la résidence sans solution de continuité, elles ne font que scander un espace perçu dans le mouvement des habitants-piétons. Le cadre du projet se veut une alternance d’espaces, à dominantes végétale ou minérale, se référant au contexte des villes méditerranéennes. Le plan général réunit deux groupements de part et d’autre de la bastide, l’une sur un point haut est plus résidentielle, et au sud un ensemble plus en contact avec l’espace public, qui reçoit, sur dalle, l’essentiel des équipements commerciaux et de santé. Le tout suit la pente par un épannelage dégressif vers le sud. Une des questions posée par les ensembles de logements conçus sous l’égide de l’industrialisation à la française reste la monotonie engendrée par la répétition. Ici, la structure béton est réalisée par un coffrage tunnel sur deux trames : 3,30 m pour les immeubles bas et 2,75 m pour les tours. Les panneaux de façades seront préfabriqués et revêtus de pâte de verre posée en fond de moule. Cette finition sera à l’origine d’une très brillante polychromie de Bernard Lassus, qui à elle seule aurait mérité une protection avant même que se posent les questions de son vieillissement et le coût de sa restauration. Aujourd’hui, en effet, on a déjà remplacé une partie de la pâte de verre par une simple peinture minérale. La démarche des architectes ouvrira plusieurs voies, notamment celle d’une certaine confiance dans le travail collectif des équipes pluridisciplinaires. Au moment de la création du grand Ministère de l’Équipement, cette approche du travail architectural va déboucher, dans la région, sur les Universités Permanentes d’Architecture et d’Urbanisme. Cette forme d’autoformation des architectes verra l’émergence de l’écologie pour définir les caractères méditerranéens de l’architecture.
2006
2020
Durousseau Thierry
Dossier individuel