Architecture religieuse ; édifice religieux ; édifice religieux chrétien ; église ; chapelle
Chapelle Sainte-Thérèse
Guadeloupe ; Basse-Terre ; rue Denis-Michaux
Bas-du-Bourg
Denis-Michaux (rue)
AS 123
20e siècle
20e siècle
1966-1969
Contexte socio-historique : Depuis les années 1940, le besoin d’une nouvelle église se faisait sentir pour le quartier du Bas-du-Bourg de Basse-Terre. La population est évaluée à environ 9000 âmes dans les statistiques de 1948 avec une natalité en hausse, particulièrement dans le quartier populaire du Bas-du-Bourg où il y a une population jeune nombreuse. Dès 1951, le diocèse de Basse-Terre a engagé des discussions pour obtenir la cession par l’armée du terrain de la Batterie, un terrain militaire qui prolonge le cimetière de Basse-Terre situé dans le quartier du Bas du Bourg et idéalement placé pour l’édification d’un nouveau lieu cultuel. Cette concession est obtenue en 1964. Dans un premier temps le culte fut célébré dans un local appartenant à M. Simmonet servant également de salle de catéchisme dès 1950-1951 en attendant le nouvel édifice cultuel. En 1964, sont établis les plans de la future chapelle par Pierre Isnard. Le 23 janvier 1966 la première pierre est posée lors d’une cérémonie. Les travaux, suivis par Gérard-Michel Corbin sont achevés en octobre 1969. L’année 1964 marque également le début de la campagne de financement pour le nouvel édifice cultuel. Pour cela, il y a la réalisation de quêtes auprès des fidèles, des manifestations comme des kermesses afin de récolter des dons. Toutefois, ce seul mode de financement n’a pas été suffisant d’où l’obligation pour la paroisse de souscrire un emprunt. Contexte religieux – cultuel : Avec le concile de Vatican II (1962-1965), une nouvelle orientation est impulsée avec une volonté de simplification du rituel mais aussi de rapprocher le clergé des fidèles lors des célébrations.
Insérée sur un terrain qui, en 1947 était destiné à recevoir une chapelle de secours et un dispensaire, la chapelle Sainte-Thérèse est un édifice en béton armé brut de décoffrage coulé sur place avec un coffrage contreplaqué. La construction se présente sous la forme d’un monolithe avec de multiples faces dépouillées de toutes ornementations et avec un espace intérieur totalement libéré de poteaux intermédiaires. Isnard utilise un style très simple et dépouillé, inspiré des basiliques paléochrétiennes. Le plan est conçu sur une base trapézoïdale, la géométrie s’évase en direction du chœur tant en plan qu’en élévation d’où une volumétrie au service de la théâtralisation de l’espace sacerdotal. Sa particularité est sa toiture. La couverture est constituée de voiles minces de béton armé autoportants, reposant sur des butées qui transmettent les charges au sol. La clôture du volume est réalisée par des voiles de 0,30 cm d’épaisseur, en béton banché, s’arrêtant à 0,20 cm de la couverture sur tout le pourtour de la construction, le vide périphérique ainsi que les vides verticaux du mur du chœur assurent l’éclairage et la ventilation naturelle de l’édifice. Tous les sols sont constitués par des chapes de ciment lissé. Les autels, siège du célébrant, l’ambon, l’écran-sacristie, les confessionnaux, le baptistère, le bénitier sont en béton brut de décoffrage. La grille du chœur, le pupitre de l’ambon, les chandeliers sont en acier étiré, vernis incolore. Les portes extérieures, les portes des confessionnaux ainsi que les dossiers et les plateaux des sièges en béton, sont en acajou verni mat. Dans le projet initial de Pierre Isnard (présenté dans les annexes documentaires, plan et maquette), il était prévu un clocher déporté sur le côté gauche de la chapelle mais jamais réalisé faute de moyens. A l’origine, la construction du clocher devait se faire lors d’une 2e tranche de travaux.
1- La singularité de l’œuvre : L’architecte Pierre Isnard signe en 1964, les plans de la chapelle du Bas-du-Bourg de Basse-Terre. Il choisit un vocabulaire moderne et différent quant aux matériaux et formes de ces autres réalisations en Guadeloupe mais également différent de celui de toutes les églises et chapelles existantes encore aujourd’hui en Guadeloupe. Toutefois, on retrouve des éléments identiques (formes et techniques) avec l’église du Sacré-Cœur de Pointe-à-Pitre dans le quartier de l’assainissement, dont les plans ont été aussi dessinés par Pierre Isnard. Pour la chapelle Sainte-Thérèse, Pierre Isnard fait le choix d’un édifice résolument moderne, dominé par le volume en dents de scie de la toiture. L’intérieur, dépouillé à l’extrême, n’est éclairé que par les étroits jours ménagés entre les murs-écrans et le toit. Une création architecturale originale dans un proche environnement ayant une valeur patrimoniale : la cathédrale Notre-Dame de Guadeloupe est un monument classé et l’église Notre-Dame du Mont-Carmel est inscrite à l’inventaire pour sa façade. 2- Le caractère innovant ou expérimental de la conception de l’édifice : Caractères innovants : 1) Valeur technique de l’œuvre 2) la qualité de la conception architecturale 3) la singularité de conception de l’implantation et de l’intégration au site et paysagère. L’édification de la chapelle Sainte-Thérèse de Basse-Terre s’inscrit dans un mouvement d’innovation architecturale caractéristique en outre-mer des années 1960 : celui du mode d’utilisation du béton armé dans la construction comme au lendemain du cyclone de 1928 et lors de la rénovation urbaine de Pointe-à-Pitre dans les années 1950-1960. Toutefois, il est a noté que ce mode de construction est apparu dès les années 1917-18 avec l’édification de la Tour du Sacré-Cœur de Basse-Terre. Ce qui fait le caractère unique de l’ouvrage est sa toiture. En effet, cette dernière repose uniquement sur les murs extérieurs qui portent structurellement le complexe architectural. La chapelle constitue une des rares réalisations contemporaines connues à ce jour en Guadeloupe. La chapelle, qui se situe sur un promontoire à la sortie de Basse-Terre, est implantée à flanc de morne aménagé en terrasses et où se déploie au pied du morne un parking public bordé de fresques et objets décoratifs puis, la chapelle et ses annexes et un peu plus haut, le cimetière de la ville. 3- La notoriété de l’œuvre eu égard notamment aux publications dont elle a fait l’objet ou la mentionnant : L’œuvre jouit d’une notoriété locale et régionale. Elle a fait l’objet de plusieurs articles dans la presse locale et régionale. Elle est également mentionnée dans les documents touristiques et patrimoniaux de la ville de Basse-Terre. 4- L’exemplarité de l’œuvre dans la participation à une politique publique : La chapelle Sainte Thérèse ne relève pas d’une commande publique dans la mesure où il s’agit d’un édifice cultuel érigé dans les années 1960. Depuis la loi du 9 décembre 1905 concernant la séparation des Églises et de l’Etat, celui-ci selon l’article 2 ne subventionne aucun culte. 5- L’œuvre comme manifeste en raison de son appartenance à un mouvement architectural ou d’idées reconnues : La chapelle Sainte Thérèse de Basse-Terre s’inscrit dans le mouvement Moderne et en particulier le mouvement dit « Le Brutalisme ». Depuis le renouveau architectural sacré opéré après la Seconde Guerre mondiale et le conseil oecuménique Vatican II de 1962, l’Eglise s’ouvre à la modernité et se coule dans le béton armé. Des architectes comme Le Corbusier, Claude Parent ou Auguste Perret ont initié ce mouvement de bâtiments cultuels en béton. On retrouve des similitudes entre la chapelle Sainte-Thérèse de Basse-Terre et les œuvres cultuelles de Guillaume Gillet à Vieux-Condé ou à Avignon et de Maurice Blanc à Grenoble.
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