Architecture de culture recherche sport ou loisir ; édifice et aménagement de culture recherche sport ou loisir ; édifice sportif ; vélodrome ; stade
Salle Jean-Moulin (ancien bains-douches de l'usine de Micheville) et stade Brandenburger
Grand Est ; Moselle (57) ; Audun-le-Tiche ; avenue Salvador-Allende
Salvador-Allende (avenue)
0009 806 ; 0009 599
20e siècle
21e siècle
1937 ; 1983
Le site de Micheville est encaissé entre les deux communes d’Audun-le-Tiche et de Villerupt. En 1872, le maître de forges Joseph Ferry, déjà propriétaire de mines, décide d’y construire une usine sidérurgique. Cette dernière prend le nom de “Société des forges et des aciéries de Micheville” dès 1875 et est mise à feu en 1878. Extrêmement florissante et productive, cette usine persiste sous différents noms jusqu’en 1973, date à laquelle la société Wendel-Sidelor décide l’arrêt de la production, sauf l’agglomération et une partie des laminoirs. La société subsistante des Laminoirs de Villerupt fermera à son tour en juin 1986. Durant l’entre-deux-guerres, l’usine encourage la pratique sportive pour favoriser la cohésion et l’esprit d’équipe. Elle décide de créer un nouvel équipement, à proximité de la sortie principale de l’usine, combinant des bains-douches (les cités ouvrières ne disposent pas de pièces d’eau), une piscine d’été et un stade omnisports. La piscine extérieure reste ouverte d’avril à octobre puisqu’elle est chauffée au gaz de haut-fourneau. Elle est achevée en 1937 et le stade en 1938. Le stade Brandenburger porte le nom de l’un des fondateurs de la JSA (Jeunesse Sportive Audunoise) fondée en 1919. Construit par la société des aciéries de Micheville, il comprend un terrain de foot, un terrain de basket, des terrains de tennis. Les bains-douches, la piscine et le stade sont rachetés par la commune au tournant des années 70. En 1976, le maire charge l’architecte communal Roger Morel de concevoir de nouveaux vestiaires dans l’emprise du stade. En 1979 débutent les réflexions du conseil municipal pour construire une salle polyvalente de 600 m² avec dominante culturelle. Le conseil étudie les modèles-types agréés issus du concours « équipements sportifs et socio-éducatifs répétitifs » lancé par la région Lorraine en 1977. Ils retiennent l’offre présentée par les architectes R. Gaertner et R. Zonka associés à l’entreprise Albin Cavada. Le permis de construire est déposé le 11 octobre 1979. Pourtant, ce projet de construction neuve ne verra jamais le jour. Dans l’un de ses courriers adressés au Directeur départemental de la Jeunesse et des Sports, le Maire d’Audun-le-Tiche, précise les raisons de ce revirement : « La réflexion collective et l’étude réalisée par l’A.T.E.C1 nous ont conduits à une réalisation tendant à l’utilisation d’un patrimoine ancien existant. Notre démarche a été motivée par une double préoccupation : économie du projet tant en ce qui concerne l’investissement que le fonctionnement ; apporter des équipements mieux adaptés et plus accessibles aux futurs utilisateurs2 ». Ainsi, la commune achète le complexe sportif situé rue Allende comprenant le stade Brandenburger et la piscine qui présentent de larges dimensions et une implantation stratégique. Mais l’objectif est avant tout patrimonial : « L’utilisation des bâtiments intéressants par leur volumétrie et leur architecture, permettra de remettre en valeur un patrimoine qui se dégrade ». Le projet de réhabilitation est confié à l’atelier d’architecture Morel-Semecas en 1983. Il prévoit de transformer les anciens bains-douches en salle polyvalente, socio-éducative et sociale. Le programme prévoit deux espaces polyvalents : l’un à dominante sportive et l’autre à dominante socio-éducative et sociale. Le chantier débute en 1983 et se termine en 1985.
Ce complexe sportif, issu d’une politique patronale paternaliste, se situe aujourd’hui dans le quartier Salvador Allende, bordant la friche sidérurgique. L’usine ayant disparu, la salle polyvalente s’insère sur un axe structurant de la commune et le stade – implanté sur les hauteurs – s’ouvre sur un paysage recomposé voué à devenir un écoquartier. Ces deux équipements, réalisés dans l’entre-deux-guerres, s’inscrivent dans le style art déco tout en déployant une architecture résolument sobre et rationnelle issue des préceptes de l’architecture industrielle. L’architecture des bains-douches exploite les capacités techniques du béton armé, des arcs porteurs en plein cintre viennent soutenir de larges voûtes en berceau et libèrent l’espace intérieur. L’édifice est composé à l’aide de volumes simples. Un premier volume, orienté nord-sud et couvert d’une voûte en berceau, marque l’entrée. Il est flanqué perpendiculairement par deux volumes identiques également couverts de voûtes en berceau. Cette composition tripartite est lisible en façade : l’avant-corps central possède une géométrie simple et affirmée induite par les choix structurels opérés. L’attention se porte sur le dessin de la baie, le travail des ferronneries et leurs motifs géométrisés. En revanche, les deux corps latéraux sont traités avec une certaine sobriété. Quelques éléments de modénature horizontaux créent une continuité : un soubassement continu, un bandeau de béton reliant les bacs à fleurs ornant chaque baie et une corniche saillante. La distribution d’origine est simple et toujours lisible en plan : un hall central distribue les deux corps latéraux comprenant les douches et les bains. Cette composition rigoureuse et symétrique permet de distinguer l’aile Est réservée aux hommes de l’aile ouest réservée aux femmes. Cette dernière présente la particularité d’accueillir moins de douches pour réserver un vaste espace aux activités sportives. Enfin, le hall abrite également un escalier monumental permettant d’accéder à la piscine extérieure. La façade sud est ainsi flanquée d’une bande servante accueillant les douches et cabines liées à l’utilisation de la piscine de plein air. Aujourd’hui, les bains-douches ont conservé leur composition symétrique. Le hall sépare la salle à destination sportive de la salle à destination culturelle. Ces deux salles présentent de larges dimensions (13 x 16,5 m) permettent une grande diversité d’usage. La réhabilitation dessinée par Roger Morel permet de rendre lisible la structure de l’édifice et de souligner les détails art déco qui ponctuent l’édifice : bacs à fleurs géométrisés, frises moulurées, et verrières centrales. Le bassin extérieur de 12x30 m a été comblé avec les gravats des démolitions puis engazonné pour devenir une aire extérieure polyvalente. Il sert aujourd’hui de terrain d’entraînement au tir à l’arc et de théâtre de verdure où les gradins sont encore utilisés pour des représentations. Plus haut dans la pente, le stade Brandenburger est composé d’un terrain de football, de deux courts de tennis, d’un terrain de basket-ball et de pistes de courses. Il a conservé son portail d’entrée art déco en acier et sa tribune permettant de recevoir 900 spectateurs. Cette dernière présente la particularité de s’implanter dans la pente naturelle du terrain puisque les gradins en béton sont encastrés. L’auvent est soutenu par quatre poteaux métalliques placés à l’avant des gradins et une charpente tridimensionnelle composée de plusieurs poutres treillis en acier.
Ce patrimoine sidérurgique issu de la politique paternaliste des Aciéries de Micheville est représentatif de l’histoire industrielle lorraine. Rendu célèbre et emblématique par la bande dessinée de l’artiste Baru, les bains-douches-piscine et le stade ont conservé leurs qualités spatiales ainsi que de nombreux détails art déco, ce qui est aujourd’hui très rare sur le territoire. Il faut également mentionner que cet édifice demeure l’une des premières réhabilitations sidérurgiques du Pays Haut et témoigne d’une volonté de défense du patrimoine sidérurgique dès les années 1980. Critères ACR : – Singularité de l’œuvre ; – Caractère innovant ou expérimental de la conception architecturale, urbaine, paysagère ou de la réalisation technique ; – Notoriété de l’œuvre ; – Valeur de manifeste de l’œuvre en raison de son appartenance à un mouvement architectural ou d’idées reconnu.
2023
Date prise en compte pour le label : 1983 (réhabilitation)
Public
2023
Berger Jade