Architecture de culture recherche sport ou loisir ; édifice et aménagement de culture recherche sport ou loisir ; édifice sportif ; piscine
Piscine de plein-air
Grand Est ; Bas-Rhin (67) ; Obernai ; 28 rue de Boersch
Boersch (rue de) 28
11515
20e siècle
20e siècle
1956
En 1947, la municipalité d’Obernai s’engage dans un projet de construction d’un complexe sportif de grande ampleur pour répondre aux besoins des établissements scolaires mais aussi aux demandes formulées par les clubs sportifs de la ville. L’Office municipal des sports envisage de réaliser une piscine, un terrain de football, un stade omnisports et une salle d’éducation physique, sur l’ancien domaine du château de Hell acquis par la commune la même année. Alors que le château et l’ancienne caserne militaire seront reconvertis en centre d’éducation populaire et logements, le parc est scindé en deux afin d’accueillir des terrains de sports. Le conseil municipal approuve la construction d’une piscine scolaire dans le parc de Hell le 13 novembre 1947. Le projet est dessiné rapidement par un architecte de l’entreprise Adam afin de bénéficier d’une subvention de l’Etat destinée à la construction des piscines scolaires. Il prévoit un bassin de 50 m de longueur, six cabines, quatre douches et un appartement au premier étage. Les travaux d’aménagement du terrain débutent en janvier 1948. Cette piscine est incroyable pour ses dimensions : le compte-rendu de l’office municipal des sports du 13 février 1948 précise que la piscine de plein air d’Obernai sera la plus grande piscine après celle des Tourelles à Paris. Le bassin de natation est mis en service durant l’été 1948, mais la seconde tranche de travaux liée à la construction des vestiaires et douches au-dessus de la rivière de l’Ehn ne sera pas réalisée immédiatement. Il faut attendre février 1951 pour que l’office communal des Sports engage les premiers travaux de génie civil à savoir la construction d’un canal permettant de détourner la rivière bordant le terrain et de nouveaux murs de soutènement. La conception d’un nouveau bâtiment d’entrée comprenant les vestiaires et les douches est confiée à l’architecte strasbourgeois Charles Gustave Stoskopf parce qu’il est chargé de la construction des nouveaux équipements scolaires de la commune1. Ce dernier présente une première esquisse au conseil municipal le 5 juin 1951 qui approuve immédiatement le parti-pris proposé. Le projet est validé en août 1952 et construit entre 1954 et 1956. La piscine et le tennis-club adjacent feront l’objet d’une rénovation-restructuration en 2016-2017 par l’agence Meyzaud & Architectes devenue Lama Architectes en 2016.
La piscine de plein air s’inscrit à l’ouest du centre historique, en contrebas du Mont National, le long du lit de la rivière de l’Ehn. Cet équipement – à l’origine isolé sur l’ancien domaine paysagé du château de Hell reconverti en parc municipal et sportif – est aujourd’hui implanté au centre d’un tissu résidentiel et touristique peu dense, témoignant de l’importante expansion urbaine d’Obernai à partir des années 70. Cette parcelle verdoyante est donc bordée par le tennis club à l’est, un tissu pavillonnaire au sud et l’un des premiers villages vacances de France à l’ouest. Le bâtiment des vestiaires est en partie construit au-dessus de l’Ehn et marque l’entrée du complexe de plein air. Charles Gustave Stoskopf dessine un volume long et étroit bordant la rue de Boesch marqué par une composition symétrique rigoureuse permettant de respecter la séparation genrée imposée par le programme. Le corps central accueillant le hall d’entrée en double hauteur de la piscine est flanqué de deux ailes strictement identiques abritant les cabines des dames à l’ouest et celles des hommes à gauche. Le rez-de-chaussée est dédié aux parties techniques et aux bains : hall, vestiaires, douches, chaufferie. En revanche, l’architecte propose à l’étage de dialoguer avec le paysage environnant : alors que les ailes abritent des cabines privatives, une grande salle centrale libérée de tout point porteur offre une vue dégagée sur la piscine et les montagnes de Vosges. Elle s’ouvre sur une grande terrasse orientée plein sud. Pour concevoir ce petit édifice, Charles Gustave Stoskopf utilise le vocabulaire et les techniques de l’architecture de la Seconde Reconstruction. Un imposant socle en grès des Vosges vient inscrire l’édifice dans son contexte et conférer une certaine monumentalité à l’ensemble. Il sert d’assise à une structure poteau-poutre béton élégante permettant de multiplier les baies au premier étage. La composition des élévations est symétrique et rigoureuse, à l’image du dessin du plan. Au sud, le soubassement massif de grès supporte un deuxième niveau beaucoup plus ouvert, entièrement vitré et rythmé par la trame porteuse en béton. Ces élévations expriment « la recherche d’une synthèse entre caractère local et les besoins de rationalisation2 ». Ici l’intention de Stoskopf est lisible à travers différents détails : le choix du grès des Vosges et sa mise en œuvre soignée, le dessin des modénatures en béton (bandeaux continus), la finesse du débord de toiture en béton ou de la casquette marquant l’entrée. Cette attention particulière montre également l’intérêt porté par Stoskopf à la modernité et au mouvement régionaliste lors de la Reconstruction. Ce projet, peu connu de l’architecte, synthétise sa volonté de conserver l’intégrité des paysages alsaciens tout en proposant une architecture rationnelle et sobre. La restructuration de la piscine de plein air et du Tennis Club réalisée en 2016 par Valérie Almeras, avait pour objectif de conserver et valoriser ce parti-pris. Elle avait également pour ambition de requalifier ces équipements mitoyens tout en mutualisant certains services (restaurant, réseaux de chaleur). Les vestiaires existants ont été entièrement repris afin de fluidifier les parcours et de permettre une remise aux normes. Un nouveau bassin en inox, plus petit que l’existant et répondant aux nouveaux besoins de la commune, a été installé en son cœur. Ainsi, les anciennes banquettes en granit bordant l’ancien bassin ont été conservées et matérialisent l’ancien tracé. Elles délimitent également un nouvel espace : une plage bordant le nouveau bassin. À l’ouest, des jeux aquatiques pour enfants ont été installés afin de diversifier l’offre aquatique. Enfin, la proposition de Valérie Almeras consiste à renforcer la composition symétrique d’origine en implantant deux volumes autonomes de part et d’autre du bassin. Ainsi, le nouveau club house (comprenant le restaurant partagé, des vestiaires et sanitaires) s’installe à l’est et répond au volume technique implanté à l’ouest. Ils sont conçus comme des miroirs : les façades possèdent les mêmes matériaux inversés. Ce parti-pris a permis de mettre en exergue les façades en grès des Vosges du volume existant et de dégager la vue sur le nouveau plan d’eau.
La piscine de plein air d’Obernai est le résultat d’une politique municipale d’après-guerre engagée dans la promotion et la valorisation du sport. Devenue le deuxième bassin de plein air français par ses dimensions, la piscine d’Obernai est un équipement hors normes lors de sa construction, ce qui a favorisé le développement du tourisme à Obernai. Aujourd’hui considéré comme le seul équipement sportif conçu et réalisé par Charles-Gustave Stoskopf, le projet de construction des vestiaires-douches reste une œuvre méconnue dans la carrière de cet important acteur des trente glorieuses en Alsace. Il illustre les volontés des architectes de la seconde reconstruction, au lendemain de la seconde guerre mondiale, qui sont partagés entre des références modernes et régionales. Ici, Stoskopf conçoit une architecture respectant le paysage alsacien tout en offrant une architecture rationnelle, économique et adaptable. Le complexe aquatique rénové présente de nombreuses qualités architecturales et conserve la composition rigoureuse et symétrique envisagée par Stoskopf dans les années 50. Il s’insère dans un cadre paysagé retravaillé et mutualisé permettant de renforcer l’attractivité du site tout en soulignant les éléments patrimoniaux existants : le bassin et le bâtiment des vestiaires-douches. Critères ACR : – Singularité de l’œuvre ; – Valeur de manifeste de l’œuvre en raison de son appartenance à un mouvement architectural ou d’idées reconnu ; – Appartenance à un ensemble ou à une œuvre dont l’auteur fait l’objet d’une reconnaissance nationale ou locale.
2023
Public
2023
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