Architecture de culture recherche sport ou loisir ; édifice et aménagement de culture recherche sport ou loisir ; musée
Musée des Beaux-Arts
Hauts-de-France ; Pas-de-Calais (62) ; Calais ; 25 rue Richelieu
Richelieu (rue) 25
XD 111 ; 285
20e siècle
20e siècle
1965 ; 1998
Ancienne cité de défense, la ville de Calais s’est développée autour de la place forte remodelée par Vauban au XVIIe siècle. De son patrimoine d’Ancien Régime subsistent des fortifications, la tour du Guet et l’église Notre-Dame tandis que la période contemporaine a légué aux calaisiens des édifices tels que le phare (1848), le Grand théâtre (1905), ou encore l’hôtel de Ville et son beffroi (projetés dans les années 1880 et inaugurés en 1925). Le musée des Beaux-Arts, ancien musée des Beaux-Arts et de la dentelle de Calais, est le fruit du travail mené, par la municipalité, en vue de sa reconstruction au titre des dommages de guerre à partir du début des années 1950, après la destruction de l’ancien musée et d’une partie de ses collections en 1940. Le projet de reconstruction, dont l’élaboration débute en 1951, se concrétise en 1966 avec l’ouverture des espaces de visite au public. L’histoire du musée de Calais s’inscrit, de façon large, dans celle de la création de musées des Beaux-Arts en France depuis le début du XIXe siècle ; mais ce n’est que sous Louis-Philippe que sera constitué le premier noyau de la collection. La destruction du musée originel au cours de la seconde Guerre mondiale et l’aventure de sa reconstruction créent une rupture dans cette histoire culturelle et donnent au nouveau musée une dimension singulière, renforcée par la particularité de l’énoncé du programme initial et son aboutissement dans une œuvre d’architecture moderne. La création de la collection de peintures représentatives de l’art de la région remonte à 1836, sous l’impulsion du maire Jacques Leveux. Enrichie au fil des ans, elle est installée au bout de plusieurs années, de façon pérenne, à l’hôtel Dessin (rue Royale), acquis par la ville pour répondre à son accroissement par donations et achats. La démolition de l’hôtel en 1879 laisse les collections sans lieu de conservation jusqu’à l’inauguration, le 6 août 1893, du nouveau musée ayant pris place – après la réunion de la commune de Calais avec celle de Saint-Pierre – dans l’ancien hôtel de ville de Calais, situé sur la place d’Armes. Mais le bombardement américain du 26 mai 1940 scelle le destin de l’ancien musée dont la destruction provoque la dispersion des œuvres ayant survécu aux dégâts ; celles-ci seront, au cours des années, regroupées à l’École des arts appliqués (rue des Soupirants).
Situé à l’intérieur des limites du canal annulaire qui cercle l’ancienne enceinte de Vauban, dans la section nord du cadastre, le musée des Beaux-Arts de Calais occupe une parcelle de plus de 3 000 m² en forme de quadrilatère entouré, sur trois de ses côtés, d’immeubles d’habitation. La façade principale, tournée vers la place de l’hôtel de ville au sud et de l’autre côté du canal, se dresse sur la rue et le parc Richelieu. A l’opposé, l’autre façade longitudinale est bordée par la rue Edmond-Roche. L’îlot est fermé, sur les côtés, par les rues du Docteur – Adolphe-Devot à l’ouest et Ernest-Lejeune à l’est ; cette dernière est attenante à un petit square arboré – aménagé conformément au devis dressé par l’architecte. Malgré la présence d’immeubles aux alentours, le bâtiment du musée paraît dégagé de ses abords en raison, notamment, de la place prévue pour diverses plantations (rosiers nains, plantes vertes et arbustes). Le musée forme un imposant quadrilatère prenant l’aspect d’une boîte de près de onze mètres de haut sur cinquante-sept de long, posée sur un soubassement en Lithogranit et couverte d’un toit-terrasse au-dessus des combles, qui sont cerclés par le bandeau de fenêtres que surmonte une haute corniche en béton sans décor, dont l’aspect monolithique contribue à unifier visuellement l’ensemble. Ses façades sont d’un dessin très sobre : leur animation consiste principalement dans le jeu entre lignes horizontales et verticales qui, selon les endroits, dessinent des encadrements fermés ou tracent des lignes de fuite ouvertes. Une différence de traitement existe entre les façades latérales, qui jouent le jeu de la régularité et de la verticalité (les baies forment des travées ordonnées), et les façades avant et arrière qui adoptent un rythme irrégulier en présentant une alternance radicale entre pleins et vides. Les différents matériaux mis en œuvre participent également de cet effet. La partie gauche à l’avant, sur le parc, déploie en toute transparence une série de verrières à la trame irrégulière en menuiserie d’aluminium, dont le dessin est cassé par le bandeau horizontal où figure l’œuvre sculptée d’Yves de Coëtlogon en pierre de Savonnières, qui prend appui sur de courts jambages de béton. A droite de l’entrée – elle-même décalée vers la droite – un haut et large mur de briques rouges à joints plats en retrait se plaque sur les espaces intérieurs, seulement percé d’une petite ouverture à très large encadrement en plaques de marbre blanc, irrégulier et évasé. L’entrée elle-même, pratiquée dans une paroi en verre – plus large que haute – dont la trame est composée de menuiseries d’aluminium tout comme la partie gauche de la façade principale, s’en distingue par la séparation arborant un revêtement d’ardoise en opus incertum et par la marquise en béton enduit blanc qui surplombe le perron, couronnant la large volée de marches à nez saillant en marbre. L’extérieur de l’édifice laisse difficilement transparaître le nombre de niveaux qu’il abrite, de telle sorte que les 1 600 m² du circuit de visite, que permettent de dégager l’ossature et les planchers en béton armé, se découvrent pleinement à l’intérieur. Le rez-de-chaussée est surélevé et repose sur un sous-sol enterré seulement percé de quelques soupiraux. Ces deux niveaux sont totaux et sont surmontés d’un étage carré ainsi que d’un niveau de combles – abritant la galerie technique – qui, quant à eux, ne sont pas praticables en totalité. Le plan de masse explique cette distinction et ce parti pris : il forme un rectangle composé de deux carrés presque parfaits, disposés d’ouest et d’est, qui ordonnent la répartition globale des espaces autour de deux unités distinctes. À l’ouest, la salle de conférences, affectée à l’un des pôles majeurs du musée (l’accueil d’événements extérieurs), occupe près d’un tiers de la place ; les deux galeries de l’exposition permanente contournent cette salle, reliées entre elles par une galerie plus étroite (côté rue Devot). À l’est, c’est le grand hall placé dans l’axe du perron et de l’entrée qui commande la répartition des espaces en introduisant à l’autre pôle du musée : les lieux de présentation des œuvres d’art. Séparé de l’entrée par des parois vitrées, le hall présente d’emblée des éléments de la collection du musée, invitant ainsi le public à se diriger vers les espaces d’exposition qui se logent dans la grande salle longeant la rue Lejeune, à l’est. Ce hall monumental, où trône le large escalier principal en béton armé revêtu de pierre dure – dont l’aspect particulièrement sculptural est adouci par sa rampe de ferronnerie au dessin sobre et la chaleur du bois de sapin rouge qui forme la main-courante – mène également vers les espaces d’exposition temporaire du premier étage. Cet étage – qui n’occupe que le carré est du plan de masse et où sont aménagés, au nord-est, les bureaux de la conservation, le secrétariat, la salle de réunion destinée à recevoir notamment la Commission du Musée – domine le rez-de-chaussée, avec sa disposition en mezzanine contournant le vide du hall. A l’origine, cette partie du circuit de visite surplombait également par un vide la salle du rez-de-chaussée située côté rue Lejeune à l’est, sur laquelle donnait une passerelle à barrières métalliques, aujourd’hui remplacée par une cloison opaque. De la même manière, à la place des ouvertures pratiquées à l’origine sur le vide du hall, ont été dressés des murs permettant d’augmenter le nombre de cimaises sur les galeries de l’étage. Le parti pris d’origine consistant en de multiples ouvertures et vides de plancher, qui occasionnait une perte de place non négligeable – et que déplorait Philippe Tautel dans son diagnostic de 1998 –, relevait du désir de créer une muséographie aérée, susceptible de procurer un certain sentiment d’espace et de liberté malgré la répartition rationnelle des fonctions. Salué par les commentateurs à l’époque de l’ouverture, l’ambition de ce parti pris était également d’optimiser l’éclairage naturel des œuvres en faisant entrer la lumière par le zénith aussi bien que par les côtés, grâce aux puits de lumière – prodiguée à travers les panneaux translucides disposés sur le toit-terrasse aujourd’hui remplacés par des panneaux en polycarbonate – percés à l’aplomb des galeries. Les dispositions et matériaux anciens se sont aujourd’hui en partie effacés, à la faveur de la réhabilitation opérée au tournant des années 2000 (dans l’optique de transférer les collections dentelle dans un musée dédié), puis à travers une série de travaux de rénovation et de réorganisation – au cours desquels la banque d’accueil transférée à la place des anciens vestiaires a, par exemple, été remplacée par un aménagement plus adapté au caractère épuré du hall. Le traitement que celui-ci avait reçu, différencié des cimaises des salles d’exposition permanente comme temporaires – tendues de toile – différait par sa colorimétrie chaleureuse de l’aspect actuel, plus neutre : de grands murs de brique rouge faisaient écho à la paroi extérieure revêtue de même, tout comme le sol en ardoise rappelait le pan de mur à gauche du perron de l’entrée. Le vide des balustrades également parées de brique répondait à la transparence des vitres du tambour d’entrée et de la baie du premier étage, ouvrant la vue sur le parc Richelieu. Il n’en reste pas moins que la nouvelle mise en valeur des espaces fait toujours la part belle à la lumière : en frappant les côtés des piliers de béton enduit et les parois blanches dressées entre les espaces, et en circulant à travers les espaces ouverts, elle donne aux intérieurs un aspect sculptural que renforce l’élégant escalier tournant disposé au cœur de l’espace central. De l’extérieur, ces dispositifs forment un véritable appel à y entrer.
"Exemplarité de l'œuvre dans la participation à une politique publique : la reconstruction du musée des Beaux-Arts de Calais, après la disparition du bâtiment et d'une grande partie des collections dans un bombardement en 1940, est impulsée par une municipalité engagée dans la démocratisation culturelle à destination de la jeunesse et la valorisation du patrimoine local. Le nouveau musée présente par des expositions permanentes et temporaires, des collections de Beaux-Arts mais aussi de dentelle, et propose des activités pour les valoriser ; Valeur de manifeste de l'œuvre en raison de son appartenance à un mouvement architectural ou d'idées reconnu : le musée, édifié grâce aux dommages de guerre par Paul Pamart, architecte très actif dans le Pas-de-Calais, est caractéristique de l'architecture de la Seconde reconstruction, de par la modernité de sa volumétrie monolithique, de ses lignes sobres, de son toit terrasse, de ses matériaux (béton, verre, aluminium), de sa distribution intérieure modulable et de sa muséographie. li s'inscrit harmonieusement dans le tissu urbain du quartier environnant avec son jardin, son plan et ses parements de brique et d'ardoise. "
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La Manufacture du patrimoine