Chapelle
Saint-Thomas-de-Canterbury
Chapelle Saint-Thomas-de-Canterbury
Normandie ; Eure (27) ; Aizier ; Saint-Thomas (sente)
Pays du Roumois
Quillebeuf-sur-Seine
Saint-Thomas (sente)
1961 AB 20
Isolé
Logis prieural ; maison
12e siècle
3e quart 18e siècle
1770
Daté par source
Les ruines de la maladrerie fondée en 1180 par l'abbaye de Fécamp sont conservées dans l’ancien bois de Fécamp qui surplombe le village d’Aizier. Placé sur l'embranchement de la voie romaine descendant de Pont-Audemer vers le port d'Aizier, le site a accueilli environ 350 malades de la lèpre entre le 12e siècle et le 16e siècle. Dans la chapelle romane dédiée ultérieurement à Saint-Thomas de Cantorbéry (1117-1170), on célébrait les messes pour ces miséreux qu’il fallait cacher des regards et séparer des habitants bien-portants. Thomas Becket, fils d’un marchand de Rouen, établi à Londres et nommé archevêque de Cantorbéry en 1162, était particulièrement vénéré en Normandie. La chapelle fut ravagée par un incendie au 15e siècle, puis perd son rôle de maladrerie dans le courant du 16e siècle pour devenir un simple prieuré dépendant de l'abbaye de Fécamp. Nommé par l'abbé, l'administrateur de la léproserie était le prêtre desservant l'église d'Aizier. La chapelle reste entretenue au cours du 17e siècle, comme l'indiquent les mentions de réparations : en 1614, le chancel est réparé et couvert de tuiles. Trois ans plus tard, un nouvel autel est mis en place. En 1627, des marchés sont passés pour réparer les maçonneries et la charpente de la nef. En 1641, des moines de la Congrégation de Saint-Maur arrivent à la tête du monastère de Fécamp. À partir de cette époque, les réparations sur la chapelle sont moins fréquentes, bien que quelques messes continuent à y être célébrées, notamment le jour de la saint Thomas. Mais les sources d'archives font état de sa dégradation avancée : en 1717, suite à une visite de Claude-Maur d’Aubigné, évêque de Rouen, la chapelle est frappée d’interdit. À la fin du 18e siècle, toutes les visites indiquent qu’elle est en ruine. En 1770, la chapelle est déclarée hors d’état de célébrer la messe, le toit est détruit, les murailles menacent de s’effondrer et la charpente est pourrie. Lors de la vente des biens nationaux, la chapelle Saint-Thomas était déjà trop délabrée pour être vendue. Sur ce site chargé de souffrances, des pèlerins ont continué à venir en procession : les habitants du marais Vernier venaient se purifier à la mare pour obtenir la guérison des fièvres paludéennes. D’autres croyances amenaient les gens à nouer les branches de noisetier ou de coudrier.Oublié pendant trois siècles et envahi par la végétation, le site a été progressivement dégagé à partir des années 1980 par le Groupe archéologique du Val de Seine (GAVS). Les fouilles menées conjointement par le GAVS et le CRAHAM (sous la direction de Marie-Cécile Truc, entre 1998 à 2008, puis de Cécile Niel, de 2009 à 2010) ont permis l’exploration intégrale de la chapelle, la découverte de trois bâtiments à l’ouest de celle-ci, d’un cimetière au nord et de diverses structures au sud. Le reste de la parcelle est émaillé de fossés et de talus parcellaires. Un parcours d’interprétation a été mis en place en 2014. La découverte d'une construction monumentale, contemporaine de la chapelle, à quelques pas à l'ouest de celle-ci, a permis de mieux comprendre l'histoire et la fonctionnalité du site. Celui-ci a sans doute servi d'habitat collectif entre le 12e et le 15e siècle, comme il était d'usage dans les prieurés de la même époque. Dans le courant du 15e siècle, le bâtiment a été arasé, tandis que deux logis plus modestes ont été aménagés dans son enceinte et habités au moins jusqu'au 16e siècle, comme l'indique la découverte d'une petite cache monétaire comprenant 290 monnaies d’argent anglaises des 14e et 15e siècles ainsi que 2 écus d’or français du 16e siècle. Une mare pavée de silex, fonctionnant par rétention des eaux de pluie, a également explorée lors des sondages archéologiques. En l’absence de source et de puits sur le site, l’aménagement d’une mare était indispensable aux soins des lépreux, par ailleurs privés d'accès aux points d'eau utilisés par les biens portants. La mare est représentée sur le terrier de 1687, tout comme le sentier dénommé « sente aux malades » reliant les berges de la Seine qui coule à 1 km en contrebas, sans passer par le village d’Aizier. Environ 250 individus ont été identifiés sur le site d'Aizier et une trentaine de sépultures, répartis en deux zones sépulcrales : la plus importante se situe au nord de la chapelle avec de nombreuses tombes disposées suivant des alignements précis. Un deuxième secteur se trouve au sud de la chapelle. L'étude des squelettes a révélé des lésions caractéristiques de la lèpre ou autres maladies infectieuses, avec des atteintes aux dents et des traumatismes divers aux membres, ou encore des cas de malformations congénitales.
Calcaire ; pierre de taille ; silex ; moellon ; appareil mixte
Plan allongé
1 vaisseau
Toit à longs pans
La chapelle comportait une courte nef rectangulaire (13,4 m x 7 m) et un chœur plus étroit (6,8 m x 6 m) terminé par un chevet plat éclairé par deux baies cintrées et ébrasées. Les murs, épais de 80 cm, sont maçonnés en silex et chaînages en pierre de taille calcaire. Les fouilles ont révélé l'existence d'un bâtiment monumental construit à 3 mètres à l’ouest de la chapelle. Mesurant 26 mètres de long sur 7 mètres de large, ses murs étaient également montés en blocage de silex et mortier avec parement de silex équarris et chaînages en pierre de taille. Le site a été réoccupé par deux petites habitations, implantées sur les ruines des murs gouttereaux du bâtiment détruit : - la première (mesurant 8 x 3,3 mètres) est divisée en trois pièces de taille égale et équipée d'une cheminée. Elle était probablement bâtie en pan de bois et torchis.- la deuxième (mesurant 8,45 x 4,20 mètres) comporte deux pièces séparées par un refend en moellons de craie, auquel s’adosse une cheminée destinée à chauffer une pièce au sol en craie.
Vestiges
: inscrit MH
Inscription par arrêté du 20 septembre 1993 : vestiges visibles ou enfouis de la chapelle et de la maladrerie, y compris la mare et l'enclos (cad. AB 19, 20) .
Zone naturelle d'intérêt écologique faunistique et floristique
Site archéologique
Propriété privée
1982
(c) Région Normandie - Inventaire général ; (c) Parc naturel Régional des Boucles de la Seine Normande
1983 ; 2023
Pottier Gaëlle ; Etienne Claire
Dossier individuel
Région Normandie – Service Inventaire du patrimoine