Beffroi
Beffroi de Rue
Hauts-de-France ; Somme (80) ; Rue ; Remparts (rue des) ; Général-Leclerc (place du)
Communauté de communes Ponthieu-Marquenterre
Rue
Remparts (rue des) ; Général-Leclerc (place du)
2024 BN 117
En ville
15e siècle
3e quart 19e siècle
1854 ; 1871
Daté par source ; daté par source
Attribution par source ; attribution par source
Le beffroi médiéval (XIIIe - XVe siècles)Si la commune de Rue bénéficie d’un certain nombre de libertés acquises en 1147 et en 1170 auprès de Jean I comte de Ponthieu (1141-1191), moyennant la somme de 640 livres, le beffroi, en tant qu’édifice, est attesté un peu plus tard, au moment où la charte communale est ratifiée par son fils Guillaume de Ponthieu, en 1211. Le document s'inspire de la charte d’Abbeville dont il reprend de nombreux articles (AC Rue ; [non coté]). Transcription française : Thierry, Augustin. 1870, vol. 1). Parmi eux figure "le droit de cloche", c'est-à-dire le droit d’avoir sa propre cloche, indépendante de celle de l’église, et donc de construire à cet effet un beffroi.Toutefois, aucun élément architectural remontant au début du XIIIe siècle n'a été préservé. L’hypothèse la plus probable — ou en tout cas celle qui est la plus souvent retenue — est que le beffroi, construit à cette époque, aurait été entièrement démoli au cours de la guerre de Cent Ans.La tour actuelle du beffroi, qui dans sa partie inférieure, remonte au milieu du XVe siècle, correspondrait donc aux travaux mentionnés en 1448 où “le beffroi fut remis sur de nouveaux sols et recouvert de neuf” (Prarond, 1862). L'absence de fouilles archéologiques à cet endroit ne permet toutefois pas de savoir si le nouvel édifice a été implanté au même emplacement que le précédent beffroi, ou s’il a été déplacé à l’occasion de sa reconstruction, comme pourrait le suggérer la mention de “nouveaux sols” évoquée dans les sources consultées par Prarond. En 1506 et 1525, il est également question de travaux sur la couverture du beffroi : des travaux qui semblent avoir été interrompus par la présence des troupes de Charles Quint dans la ville et qui ont manifestement provoqué l’arrêt des travaux également à l’église Saint-Wulphy (IA80011166) et à la chapelle du Saint-Esprit (IA80001213). Avec l’avènement de François Ier (1515-1547) au trône de France, qui marque un renforcement de l'autorité monarchique, la ville de Rue perd une partie de son autonomie, sans que la situation n'ait toutefois d'incidences sur le beffroi. En 1544, le monarque fait payer aux habitants de Rue leur collaboration avec les Bourguignons en faisant fondre symboliquement la cloche communale. La revente du métal est alors censée financer la présence supplémentaire d’hommes en armes pour assurer la sécurité du territoire du Ponthieu. Sous Henri IV (1594-1610), la ville est de plus en plus contrôlée par la royauté pour se mettre à son service. Elle est alors administrée par un corps composé du maire (mayeur), de quatre échevins, du seigneur, du procureur du roi, d’un substitut, d’un greffier, de deux argentiers et d'un chevalier du guet - ce dernier rappelant que le beffroi n'est pas seulement un symbole de liberté politique d'une commune, mais qu'il est également un élément important de la sécurisation de la ville en servant de guet intérieur et extérieur. Au tout début du XVIIIe siècle, le beffroi est touché par la foudre. Les dégâts occasionnent la réfection de la couverture (charpente et toiture).Du beffroi à l'hôtel de ville : les travaux du XIXe siècleDans le sillage du nouveau découpage administratif des communes et des cantons (loi du 14 décembre 1789) et de l’institution des justices de paix (loi des 16-24 août 1790), la ville de Rue devient chef-lieu de canton. Avec ces nouvelles attributions, l’espace même du beffroi n’est plus adapté à la tenue des séances du Conseil municipal et des séances de jugement de la justice de Paix. Aussi, à partir de 1822, moyennant une subvention de 1080 francs provenant de la sous-préfecture d’Abbeville, la municipalité de Rue est invitée à envisager la construction “d’une salle du Conseil municipal et d’audience pour le juge de paix, ainsi qu’une habitation pour le concierge”. Le projet, estimé à 6750,24 francs, est confié à Aimable Mathurel, architecte d’arrondissement, établi à Abbeville. Les nouvelles constructions s’étendent à l’arrière du beffroi, le long de la rue des Remparts (ancienne rue du Pont-aux-Renards) et le long de la parcelle attenante à l’hospice. Ces nouveaux bâtiments sont représentés sur le plan parcellaire cadastral, dit plan napoléonien, de 1828. En parallèle, le sommet du beffroi, où se trouve la prison, se dégrade fortement : “il y a une voûte de cet édifice qui est tombée et que pour conserver celle qui reste et qui couvre la prison, il est indispensable d’établir un comble et une couverture sur ladite tour" (AC Rue ; DB1 - registre de délibérations du Conseil municipal de Rue, 1822-1838, n°21). Le Conseil municipal envisage donc de profiter des travaux de construction du nouvel hôtel de ville pour couronner le beffroi d’un nouveau clocher, qui pourra abriter à la fois l’horloge propre au beffroi ainsi que la cloche de l’église Saint-Wulphy (IA80011166), dont la démolition est de plus en plus à l’ordre du jour depuis l’effondrement des voûtes de la nef lors de l’ouragan du 22 février 1798. Toutefois, faute de ressources suffisantes, le projet évoqué pourtant en 1822 n’est toujours pas réalisé au milieu du XIXe siècle. En 1851, les sources évoquent enfin la réalisation de "travaux à faire à la tour de la prison pour y placer une horloge et la grosse cloche de la paroisse qui est inutilisée depuis vingt ans" (AD Somme ; 99 O 3314). La même année, le Conseil municipal fait le choix de Renard, mécanicien horloger à Ferrières (Oise) pour la fourniture de l’horloge du beffroi, moyennant la somme de 1014 francs (AC Rue ; Registre DB2, f° 115). Le projet architectural, qui prévoit toujours de pouvoir abriter la cloche de l’église paroissiale, est désormais confié à Théophile Plisson, architecte à Abbeville. Les sources précisent bien que la cloche paroissiale “devra servir à sonner les offices et pour toutes les cérémonies de l'église en même temps que l'Angélus tous les jours et qu'elle devra servir aussi aux besoins de la commune” (ibid.). Mais avant même que les travaux ne commencent, la voûte du deuxième étage s’effondre en 1852 (AD Somme ; 99 O 3314). Dès lors, le projet change d’envergure : il est désormais envisagé de coiffer le beffroi d'un toit surmonté d’un campanile et de rétablir les échauguettes aux angles de la tour (ibid.). Les travaux considérés comme urgents sont menés rapidement. Ils sont achevés en 1854, comme en témoignent les sources de suivi des travaux (AD Somme ; 99 O 3314 et AC Rue ; Registre DB2, f°134) ainsi que l’aquarelle de Macqueron réalisée d’après nature le 18 octobre 1854 (ill.).Les travaux de restauration ne s’arrêtent malheureusement pas là. En 1857, l’hôtel de ville ainsi que les écoles sont à nouveau en très mauvais état (AC Rue ; Registre DB2, f°145). En 1861, l’hôtel de ville menace ruine et sa reconstruction devient imminente. Le Conseil municipal ne parvient à voter les travaux qu’en 1666 et à charger Alfred Delignière, architecte de l’arrondissement d’Abbeville, de proposer plusieurs projets architecturaux (ill.). Léon Gillard dessine l’édifice juste avant le début de cette nouvelle campagne de construction (ill.). Après débats et conseil auprès de la commission des Bâtiments civils, la proposition d’un édifice néo-gothique est retenue. Les plans et devis sont ainsi approuvés par arrêté préfectoral en date du 28 décembre 1867 pour la somme de 47 175,56 francs. Les travaux sont adjugés le 1er mars 1868 à Bellettre Dubois et la réception définitive des travaux est signée le 16 juin 1871 (AC Rue ; Registre DB3, f°62).Les années qui suivent sont consacrées à l’installation d’une nouvelle horloge exécutée une nouvelle fois par M. Renard, horloger à Ferrières (Oise) ainsi qu’à la pose des menuiseries et des papiers peints dans la salle du Conseil et de justice de paix selon les plans de Delignière (ill.). Mais en 1898, le peintre local Siffait de Moncourt propose au Conseil municipal de décorer gracieusement cette salle de peintures (IM80002174) "exprimant par différentes scènes prises à Rue ou dans les environs la vie propre des habitants du pays et leurs occupations" (AC Rue ; Registre DB5, séance du 30 juillet 1898, f°90). L'ensemble réalisé entre 1899 et 1901 est inauguré en 1902.Depuis 2005, le beffroi de Rue, comme 55 autres beffrois situés en Belgique et dans le nord de la France, est inscrit sur la liste du Patrimoine mondial de l’Unesco au titre du bien sériel "Beffrois de Belgique et de France". À l’échelle du territoire du Ponthieu, les beffrois d'Abbeville (IA80010576) et de de Saint-Riquier (IA80001219) font également partie de cette inscription.
Calcaire ; pierre de taille
Ardoise
2 étages carrés
Voûte d'ogives
Escalier dans-oeuvre : escalier en vis, en maçonnerie
Le beffroi se présente actuellement comme une forte tour carrée, en calcaire sur soubassement de grès, flanquée de contreforts d'angles à retraits successifs. Sa partie supérieure est cantonnée de quatre échauguettes en encorbellement, coiffées de poivrières et établies sur des bases inégales. La construction se divise en deux étages sur rez-de-chaussée. Celui-ci ne comprend qu'un vestibule, voûté sur croisée d'ogives et ouvert sur la rue en tiers-point. La salle du premier étage a conservé sa voûte d'ogives ; au second, la voûte s'est effondrée. Un escalier de soixante-seize marches mène à une balustrade.La salle du Conseil et des justice de paix, située à droite de l'entrée, dénommée aujourd'hui, salle Siffait de Moncourt, mesure 8 m de long sur 6,50 m de large. L'ensemble des murs intérieurs est recouvert des toiles marouflées (IM80002174) peintes par Albert Siffait de Moncourt (1858-1931), artiste local, qui représentent huit scènes de la ville de Rue. De l'autre côté de l'entrée, à gauche, un espace plus grand est occupé par la salle des fêtes. Ces deux salles latérales sont couvertes d'un simple plafond.
Style néo-gothique
1926/02/19 : inscrit MH ; 2015/09/13 : inscrit MH partiellement
Inscription MH du beffroi par arrêté préfectoral du 19 février 1926 - Inscrition partielle par arrêté préfectoral du 13 septembre 2015 : Les bâtiments adjacents au beffroi, en totalité, à l'exclusion de la salle des fêtes au nord et des coulisses du théâtre, correspondant aux locaux administratifs de l'ancienne mairie dans le pavillon ouest et à l'ancienne salle de la Justice de Paix dans le pavillon est (cad. BN 117) .
À signaler
Ce dossier créé en 1997 dans le cadre de la mission d'inventaire du patrimoine gothique en Picardie, a été enrichi en 2025 dans le cadre de l'Inventaire topographique du Pays d'art et d'histoire Ponthieu Baie de Somme.
Propriété de la commune
1997
(c) Région Hauts-de-France - Inventaire général
2006 ; 2025
Fournier Bertrand ; Belard Karine ; Schill-Fenninger Hélène
Dossier avec sous-dossier
Conseil régional Hauts-de-France - Service de l'Inventaire du patrimoine culturel 21 mail Albert-Ier 80000 Amiens