R 19 P
ERNST Max
Brühl (Allemagne), le 2 avril 1891 ; Paris, le 1er avril 1976
Fleurs de coquillages
Fleurs sur fond rouge ; Composition
1929
2e quart 20e siècle
Toile ; peinture à l'huile
H. 1,29 ; La. 1,29 m.
Signé et daté en bas à droite : "Max Ernst 29" (à la peinture ocre)
En 1928, Léonce Rosenberg passe commande d’un ensemble de peintures à Max Ernst afin de décorer la chambre de sa fille Madeleine. Le 25 février 1929, Max Ernst vend à Léonce Rosenberg, pour la somme de 12.000 Frs, sept peintures intitulées « Fleurs », sur fond de diverses couleurs et de divers formats, dont cette toile, la plus grande, portant le titre « Fleurs sur fond rouge». Le reçu détaille : "Reçu de monsieur Léonce Rosenberg Paris, la somme de Frs 12000 (douze mille) par un chèque n° 11486 sur la Westminster Bank en règlement de son achat de : 1°- toile de 60 "Fleurs sur fond rouge" [suit la description de six autres peintures également intitulées "Fleurs"] "que je lui ai cédées ce jour au prix de 12000 francs. Paris, ce 25 février 1929, Max Ernst" (1). Le tableau serait acheté en mars 1944 à la galerie Jeanne Bucher. En l’état actuel des recherches, les sources documentaires ouvrent sur deux pistes quant à l’identité de l’acheteur : - Deux courriers, rédigés en 1964 et en 1974 par Günter Aust, directeur du Von der Heydt-Museum de Wuppertal, informent que l’œuvre a été achetée à la galerie Jeanne Bucher par l’architecte Heinz Rasch (2) (3). - La documentation constituée dans l’après-guerre à partir de la déclaration obligatoire série n° K. 558 souscrite par Kurt Herberts (conformément aux réglementations sur les biens artistiques provenant des territoires occupés détenus par des Allemands) laisse conjecturer que le tableau ait fait partie d’un lot d’œuvres d’art acheté le 9 mars 1944 par le « Dr. Kurt Herberts 1 Co., Lackfabrick » de Wuppertal à la galerie Jeanne-Bucher Myrbor de Paris, 9ter boulevard du Montparnasse, pour la somme de 6.500 RM (4). Le lot inclurait aussi le tableau R 18 P et le dessin R 10 D. La relation amicale avérée entre Heinz Rasch et Kurt Herberts pourrait éclaircir la divergence entre les deux pistes en rendant plausible l’hypothèse d’un accord entre eux, soit au moment de l’achat de l’œuvre, soit à l’occasion de la déclaration aux autorités Alliées. En 1946 ou 1947, faisant suite à la déclaration obligatoire série n° K. 558 produite par Kurt Herberts, le Chef de la Mission française pour les Réparations et Restitutions en Zone britannique d’occupation présente une « Demande des biens à remettre au Gouvernement français par l’Allemagne » relative à des objets d’art localisés chez le « Dr. Kurt Herberts & Co, Lackfabrik, Wuppertal-Barman, Christbuchstrasse 25 » (5). La demande mentionne parmi les fournisseurs la « Galerie Jeanne Bucher-Myrbor, Bd. du Montparnasse/ Paris 6e » et parmi les pièces à récupérer un nombre « non précisé » de « Tableaux anciens, plastiques etc » pour une valeur totale de 6500 RM en 1938 (6). L’autorisation d’enlèvement pour les pièces mentionnées dans la réclamation est délivrée le 16 février 1948 par la Reparation, Deliveries & Restitutions Division (7). Les pièces sont restituées par les Autorités britanniques aux Autorités françaises le 8 janvier 1949 (8). Le même jour, elles sont envoyées à l’OBIP, à Paris, par le troisième convoi du CCP de Düsseldorf, puis prises en charge par la CRA à leur arrivée le 19 janvier 1949 (9). Le 27 janvier 1949, A. S. Henraux requiert par courrier au Chef de la Mission française pour les Réparations et Restitutions en ZBO une confirmation sur l’identité des œuvres parvenues de Düsseldorf, dont le dessin de Max Ernst, les biens déballés ne correspondant pas à ceux qui étaient annoncés par un télégramme. Ce dernier ne mentionne aucune œuvre d’art moderne mais indique, outre des pièces d’autres genres, « 9 Tableaux anciens et 1 Plastique ancienne ». Bien qu’une note du 7 février 1949 répercute la requête d’Henraux au Délégué de la Mission Française à Düsseldorf, les dossiers consultés ne contiennent pas de documents éclaircissant la question (10). Le tableau est inscrit à l'inventaire provisoire spécial du musée national d'Art moderne le 20 octobre 1950 et retenu par la cinquième Commission de choix des œuvres d'art (enregistrement dans le P.V. de la sixième Commission de choix), sous la description : "peintures et dessins modernes ; provenance : néant ; époque : XXE ; auteur : Max ERNST ; sujet : Composition". Il est attribué le 13 août 1951 "aux musées nationaux (musée d'art moderne)" par arrêté du Ministre de l’Éducation Nationale (11). Le tableau est mis en dépôt au musée d'art et d'histoire du Judaïsme du 20 novembre 1998 au 15 décembre 1999 puis revient en 2000 au musée national d'Art moderne. Il y est actuellement conservé (12).
Champ Catégorie renseigné d'après les données de la mission Mattéoli ; historique enrichi en 2024. Voir notice de la collection en ligne du MNAM : https://collection.centrepompidou.fr/artwork/150000000019414
Oeuvre dont l'historique est incomplet entre 1933 et 1945, en l'état des recherches actuelles.
Les informations en notre possession sur Kurt Herberts, collectionneur et propriétaire d'une usine de vernis à Wuppertal, sont fragmentaires. Son nom apparaît dans les biographies consacrées à des artistes allemands proscrits par le régime nazi, dont Oscar Schlemmer et Willi Baumeister, auxquels il avait donné refuge en les invitant à participer à un laboratoire de recherche sur des procédés de techniques picturales. Selon un rapport d'après-guerre du sixième comité de confiscation des profits illicites, pendant l'Occupation, Herberts a habité à Paris où son usine avait une succursale. Celle-ci, selon le rapport, "se bornait à introduire sur le marché français des produits destinés en fait à l'armement allemand". Pour ce qui concerne la galerie Jeanne Bûcher, celle-ci ayant été sollicitée par le musée national d'Art moderne au cours de l'année 2006 afin d'élucider la provenance des MNR R 18 P, R 19 P et R 10 D, a communiqué ne posséder aucune information sur le passage de ces trois œuvres dans ses murs.
Fr 19
Inscriptions au revers : Sur la toile : au crayon, "R n° 19 P" ; à l'encre "REC 19 P" ; à la peinture blanche "61" ou "19", "10" ; cachet rond noir “G.P [illisible]”. Sur le châssis : Au crayon "ERNST Max", "HAUT" ; au crayon bleu "C16" ; au feutre noir "12" ; au stylo rouge "6-1", "5-1", "6e1" ; au crayon rouge "26" ; au crayon bleu "11". -Traverse centrale horizontale : Au crayon bleu "46 3P cat 13" ; au crayon rouge "3" ; étiquettes, au crayon noir : "b 20" ; "Kunsthalle Basel/N 2914" ; "Lot n°/B-623/024/Security Wash.DC" ; "SL.68.22.13/Int.Exhib.Found" ; "420/L'exposition d'Art français/au Japon/1961" ; "Express Tra (...)/ 27 rue de Flandre (...)/Transport de tableaux e(xpress) Numéro 19 Aute(ur) ERNS(T) Titre Composition/133" et surchargée à l'encre rouge "3" ; étiquette ronde sans inscription.
Paris ; musée national d'art moderne
Paris ; musée national d'art moderne
1952 (30 août-5 octobre), Bâle, Kunsthalle, "Phantastische Kunst des XX. Jahrhunderts", n° 92. 1961-62 (3 novembre-15 janvier), Tokyo, Musée national ; (25 janvier-15 mars), Kyoto, musée municipal : "Exposition d'art français au Japon 1840-1940", n° 420. 1965 (3 juin-4 juillet), Rio de Janeiro, Museu de arte moderna ; (août-septembre) Buenos-Aires, Museo de Bellas Artes ; (octobre-novembre) Montevideo, Museo nacional de Bellas Artes ; (novembre-décembre), Santiago de Chili, "Exposition de peinture française contemporaine", n° 10. 1967 (avril-octobre), Montréal, Exposition Universelle, pavillon français. 1967, Washington, New Gallery of Art ; New York, Metropolitan Museum of Art ; Boston, Museum of Fine Arts, "Painting in France 1900-1967", n° 13. 1968 (27 novembre-15 décembre), Paris, Galerie l'Œil, "Max Ernst". 1975 (16 mai-18 août), Paris, Galeries nationales du Grand Palais, "Max Ernst", n° 163, repr. 1981 (juin-octobre), Moscou, Musée Pouchkine. 1997 (9-21 avril), "Présentation des œuvres récupérées après la Seconde Guerre mondiale ..." Paris, Centre Georges Pompidou (Cat. : n° 11). 1998-1999 : Singapour et Hong-Kong. 2004-2005 (10 septembre 2004-16 janvier 2005), "The Flower as Image", Louisiana museum of Art, Humlebaek et Bâle (Cat. : p. 54 et 92). 2007 (5 avril-7 juillet) "Der Himmel auf Erden" à la Städtische galerie im Lenbachhaus, Munich. 2008 (18 février-3 juin), Jérusalem, Musée d'Israël ; (24 juin-28 septembre), Paris, Musée d'Art et d'Histoire du Judaïsme, "A qui appartenaient ces tableaux ? Looking for owners", (Cat. : p.174-175).
SPIES, Werner (sous la direction de), "Max Ernst. Oeuvre-Katalog", 7 volumes, Cologne, M. Dumont Schauberg, Houston, Mesnil Found, 1975-1988, vol. 2 (Werke 1906-1925), n° 1378 p. 301. BEAUMELLE, Agnès de la, "Max Ernst. Ubu imperator, 1923, Chimère 1928", dans "Cahiers du MNAM", juillet 1984, p. 31-32. "Surréalisme", Paris, Éditions Cercle d'Art, deuxième semestre 1996, ill. 13.
(1) Musée national d'Art moderne, documentation, dossier d’œuvre : archives privées. (2) L’architecte Heinz Rasch est, dans l’après-guerre, propriétaire et organisateur du Studio für neue Kunst à Wuppertal. (3) Musée national d'art moderne, documentation, dossier d’œuvre, extraits des courriers de Günter Aust, directeur du Von der Heydt-Museum de Wuppertal : A - courrier adressé le 10 mars 1964 à Helmut R. Leppien de la Kusthalle de Hambourg : « […] Monsieur Rasch m’a quand même assuré que dans l’exposition figuraient les trois œuvres de Max Ernst suivantes : -1. Fleurs- 1927, Huile sur toile, format vertical (Brun, rouge, bleue et blanc) -2. Forêt, frottage au crayon, 70 x 85 cm, signé à droite en bas : Max Ernst -3. Paysage avec [ ?], 1917 Aquarelle, 15 x 22 […]. L’aquarelle appartient encore à Monsieur Rasch, les deux autres œuvres qu’il a acquises pendant la guerre en France chez Jeanne Bucher, devaient être rendues en 1947. Le tableau à l’huile se trouve à Paris dans une collection publique en tout cas d’après une connaissance de M. Rasch qui prétend l’avoir reconnu. Il s’agit probablement d’une peinture du même type que le tableau du Wallraf-Richardtz-Museum. […] ». B - courrier adressé le 26 novembre 1974 à Günter Metken, co-auteur avec Werner Spies du catalogue raisonné de Max Ernst : « […] L‘ancien commissaire et propriétaire du Studio, Monsieur Rash, m’a dit qu’il possédait à cette époque-là un tableau à l’huile intitulé ‘Fleurs’ de Max Ernst, un format vertical, environ 80 x 65 cm. Ce tableau, ainsi que le frottage représenté dans le catalogue, ont été restitués au début des années cinquante à la France. On ne sait pas où se trouvent aujourd’hui ces tableaux. […] ». Les informations fournies par ces deux courriers sur le tableau intitulé « Fleurs » ne correspondent pas entièrement à celles du R 19 P (date, dimensions, format), tout en renvoyant à ce dernier en raison notamment de la restitution de l’œuvre à la France et de son parcours parallèle au frottage intitulé « Forêt », identifié avec certitude au MNR R 10 D. (4) MEAE/209SUP269 B108 : Dossier claim n° 1878. Kurt Herberts, collectionneur et propriétaire d’une usine de vernis à Wuppertal, apparaît dans les biographies consacrées à des artistes allemands proscrits par le régime nazi, dont Oscar Schlemmer et Willi Baumeister, auxquels il avait donné refuge en les invitant à participer à un laboratoire de recherche sur des procédés de techniques picturales. Selon un rapport d’après-guerre du sixième Comité de Confiscation des Profits illicites, Herberts séjournait à Paris pendant l’Occupation, où son usine avait une succursale avenue des Champs-Elysées. Celle-ci « se bornait à introduire sur le marché français des produits destinés en fait à l’armement allemand ». (5) Le formulaire pré- imprimé, rempli par le réclamant en tapuscrit, porte la date du 3 juin 1947 ajoutée à la main. (6) MEAE/209SUP269 B108 : la demande, classée sous le numéro « B.C.R. [Bureau central des restitutions] 1672 », porte aussi le numéro manuscrit « 2471 » et dans d’autres documents elle est répertoriée comme « Claim n° 1878 ». En reprenant l’une des formules adoptées pour les réclamations en ZBO, le paragraphe consacré aux « Détails concernant le transport des biens en Allemagne » indique : « Vente à Dr Kurt Herberts & Co. Lackfabrik, Wuppertal-Barman, imposée aux fournisseurs français par les autorités allemandes sous l’occupation » ; voir aussi la fiche n° 3 des services de récupération britanniques relative à la déclaration obligatoire n° K 558 du « Dr Kurt Herberts & Co., Lackfabrick », non datée, concernant des œuvres acquises à la galerie Jeanne Bucher-Myrbor : la fiche indique au « 9.3.44 » la date de la transaction et mentionne « Description of Property » : « Works of art, / anciens pictures, / from differents artists/ plastics, as.o. / in various kinds ». (7) MEAE/209SUP269 B108 : Copie de l’autorisation. (8) MEAE/209SUP269 B108 : « Receipt and agreement for delivery of identifiable property ». (9) MEAE/209SUP269 B108 : Déclaration d’expédition de la société de transports Schenker & Co « Nr. Frau. Rü. 258/7 » ; MEAE/209SUP430 P84 : cahier de pointage, p. 32 ; Attestation de la CRA du 19 janvier 1949. (10) MEAE/209SUP269 B108 : le télégramme reprend avec quelques modifications la liste des œuvres accompagnant la Demande des biens de la « Claim n° 1878 » ; courrier d’A. S. Henraux au Colonel P. Villemer, Chef de la Mission française pour les Réparations et Restitutions en Zone Britannique, à Bad-Salzuflen, du 27 janvier 1949. Parmi les pièces parvenues à Paris, le courrier mentionne : « caisse 1878/3 / 1 grand panneau– fleurs, signé Max Ernst 29 » ; copie de la note. (11) AN, Archives des musées nationaux, 20150044/99, 1950-1958. (12) SMF, sous-direction des collections, dossier Récupération : Courrier du musée national d'Art moderne du 25 avril 2014.
Cette œuvre est vendue en France pendant l’Occupation à un ressortissant du Reich. Après la guerre, en application des réglementations en vigueur, l’acheteur a déclaré son bien et l’a rendu aux autorités de la Zone britannique d’occupation. L’identification du vendeur et de l’acheteur est incertaine.
2024-12-04
© ADAGP. © Musée national d'Art moderne.