Retable
Dit du Dévôt Christ
Retable du Dévôt Christ
Occitanie ; Pyrénées-Orientales (66) ; Ille-sur-Têt ; église Saint-Etienne
66088
Anciennement région de : Languedoc-Roussillon
Vinça
Église Saint-Etienne
PA00104037
Dans la 4e chapelle ouest de l'église.
Menuiserie ; sculpture
Bois : taillé, peint, polychrome, doré
Autel de plan rectangulaire à élévation galbée, surmonté de 4 gradins superposés à élévation droite. Le retable est de trois niveaux à travée unique. Au-dessus d'un soubassement à piédestaux superposés, 4 colonnes encadrent une niche creusée dans le mur de la chapelle et surmontée d'un dais, entablement et fronton cintré couronnés d'une gloire encerclant une statue ; amortissements latéraux : médaillons peints. Au bas de la niche centrale, 3 culots sont destinés à recevoir des statues ; deux statuettes en ronde-bosse encadrent l'entrée de la niche centrale. La typologie est celle d'un retable à portique permettant d'accueillir le Christ en croix (1754), la statue de Notre Dame des 7 Douleurs pour les utiliser lors des processions. Polychromie : pour des raisons d'économies financières l'ensemble est réalisé en bois avec des peintures reproduisant le marbre. Les teintes sont le noir et le rouge comme dans la très grande majorité des retables du Christ. Il semblerait que sous les repeints noirs du siècle dernier subsistent des traces de peinture de faux marbre rouge veiné de blanc. Ce type de retable est également caractérisé par l'absence de sculptures en relief et de scènes sculptées. Seuls les objets et outils de la Pasion du Christ ornent chaque piédestal de chacune des quatre colonnes.
H = 253 ; la = 94 ; pr = 65
Repeint
2e quart 18e siècle
1738 ; 1748
Retable attribué au sculpteur perpignanais Joseph Navarre, venu à Ille pour effectuer différents travaux. Pierre Navarre, père de Joseph, est connu pour avoir sculpté le baldaquin de la cathédrale d'Elne sur le modèle de celui de Saint-Germain-des-Prés à Paris. C'est lui qui a introduit le modèle d'autel dit à la romaine puis à la parisienne, autel à baldaquin. Le commanditaire de ce retable, don Bernardin de Andena y Arago, s'est fait concéder la chapelle en 1738 avec l'obligation d'y faire construire un nouveau retable dans un délai de dix ans. La famille de Ardena y Darnius fait partie de la catégorie sociale de la noblesse, de la bourgeoisie honorée. C'est vers l'atelier de sculpteurs qui a réalisé le retable à baldaquin de l'antique cathédrale d'Elne (Pierre Navarre, 1721-1724) que cette famille va faire appel. Nous retrouvons souvent cet atelier dans les années qui précèdent ou suivent la moitié du XVIIIe siècle dans l'église Saint-Etienne (retable du Saint-Sacrement), dans les églises d'Ille (chapelle de l'hospice Saint-Jacques, église principale de l'ermitage de Saint Maurici de Graolera), dans le village voisin de Néfiach, dans les édifices religieux d'autres villes importantes du Conflent (Vinça, tabernacle ; Prades, tabernacle du retable du Christ). Joseph Navarre intègre le parti pris du retable à baldaquin qu'il va adapter à l'édifice pour lequel il doit oeuvrer. Dans les retables du Christ, il opte de manière générale pour des baldaquins adossés surmontés d'un dais. Le tabernacle (qui n'appartient pas à l'ensemble) a été ajouté au XIXe siècle. Le baldaquin comme les rochers sont composés en toile empesée, pratique répandue chez les sculpteurs. Le retable est à transformation : les chapelles du Christ étaient utilisées quotidiennement pour la dévotion mais surtout pour la semaine sainte. On y installait des décors de toile le Jeudi saint pour le reposoir et le Vendredi saint pour l'adoration de la croix. Les gradins étaient alors démontés, il n'y avait pas de tabernacle. L'autel date de 1738. (Source : Laurent Hugues, conservateur des Monuments historiques). Ces retables du Christ ont une dimension anthropologique importante due à la pratique liturgique active. Les éléments qui composent le retable, ses statues, sont des objets processionnels qui doivent sortir à des moments liturgiques bien précis, d'où la forme de ces retables, en théâtre, avec leur baldaquin. Les objets n'y font que reposer pendant l'année avant de faire l'objet de ces pratiques liées à la dévotion de la Semaine sainte. Pratiquement chaque paroisse roussillonnaise dispose de son retable du Christ, géré par la confrérie qu'on appelle en général confrérie de la sanch, c'est-à-dire du sang du Christ. Le remploi de statues plus anciennes comme pour ce retable (Christ aux liens et Christ à la colonne - PM66001493, PM66001494), est récurrent dans l'art des retables, ces objets ont une valeur artistique importante mais aussi une valeur anthropologique. Un lien se fait avec le passé et avec les pratiques qui ont eu lieu précédemment. Souvent, l'image centrale est beaucoup plus ancienne que le retable lui-même, parce qu'on actualise la dévotion, mais qu'on tient à préserver les images précédentes. (Source : Olivier Poisson, inspection des patrimoines, collège des monuments historiques). Ce type de retable se rencontre plus souvent dans les régions du Ribéral et du Roussillon, ce sont des zones géographiques qui ont été plus rapidement perméables aux influences françaises. Les deux ateliers de sculpteurs de Cantayre et de Joseph Navarre synthétisent l'apport de la tradition de l'époque baroque en sculpture et une adaptation certaine aux nouveaux modèles français. Le retable du Christ de l'église d'Ille en est un des exemples les plus aboutis aux côtés des retables du maître-autel, du Saint-Sacrement ou du Christ Ressuscité et de celui du Rosaire conservés dans cet édifice. Comme la confrérie du Rosaire, celle de la Sanch joue un rôle important dans la production de retables en bois polychrome aux XVIIe et XVIIIe siècles. Chaque église possède sa chapelle du Christ ornée d'un retable et du moblilier nécessaire au déroulement des processions et des célébrations de la Semaine sainte.
Propriété de la commune
Classé au titre objet
2013/10/25 : classé au titre objet
Arrêté n° 068. Commission nationale des monuments historiques du 04/02/2013. Commission départementale des objets mobiliers du 18/11/2011. L'arrêté donne une autre datation : deuxième moitié du XVIIIe siècle.
Service de conservation des antiquités et objets d'art des Pyrénées-Orientales ; Laurent Hugues (conservateur des Monuments Historiques)
Dossier individuel