M.P.Lav.1894-232
Allégorie de la ' Vanitas ' et de la Pénitence
CAGNACCI : Sant' Arcangelo di Romagna, 1601 ; Vienne, 1663
Italie
Ancienne attribution : SCHEDONE Bartolomeo, Jusque 1937
1640
Hauteur en cm 69.8 ; Largeur en cm 63.6
Cette oeuvre a été interprétée comme une Madeleine pénitente, jusqu'à ce qu'Odile Delenda propose en 1986 d'y reconnaître plutôt une Allégorie du temps qui passe, puis une Allégorie de la ' Vanitas ' et de la pénitence (cat. exp. Paris, 1988-1989, p. 138). Bien que la jeune femme soit accompagnée - comme on le voit dans les nombreuses représentations de la Madeleine produites après le concile de Trente - d'un crâne, d'une natte de joncs tressés et d'un bloc de pierre, évocations de sa retraite, mais aussi illustrations emblématiques de la pénitence, de la méditation, de la pauvreté et de la perpétuité, la nudité du modèle, sa coiffure soignée et son expression songeuse, ne correspondent pas aux évocations habituelles de la sainte recluse (longs cheveux épars, yeux levés extatiquement vers le ciel...), comme Cagnacci lui-même l'a dépeinte à l'Oratorio Santa Maria Maddalena à Urbania (Sainte Madeleine pénitente au pied d'une croix). De plus, le modèle tient ici délicatement dans sa main droite une rose et une fleur de pissenlit, ainsi que dans sa main gauche une chandelle juste éteinte, encore fumante, symboles de la fragilité de la vie humaine, qui autorisent à interpréter le tableau plutôt comme une Vanité, invitant le spectateur au mépris des jouissances terrestres, à la pénitence et la méditation sur la mort, autant de messages largement délivrés par les théologiens de la Contre-Réforme. Pour compléter la question complexe de la définition du sujet soulignons, à la suite d'A. Tapié, que cette silhouette nue à l'érotisme glacé, qui s'impose moins par son ' naturalisme sensuel ' que par sa personnalisation de ' la vérité dévoilée ', joue sur l'ambiguïté, car l'exemplaire effigie de l'anachorète se discerne bien sous les traits de cette Allégorie et l'on ' ne peut empêcher les attributs de 'fonctionner' dans leur polyvalence '. Pasini (1967) a rapproché l'iconographie originale de cette composition d'une autre peinture de Cagnacci, Allégorie de la vie humaine (loc. inconnue), montrant une jeune femme dénudée tenant d'une main une rose et un pissenlit, de l'autre un sablier, évocations du temps qui s'écoule, avec au-dessus de sa tête un serpent se mordant la queue, signifiant ' le temps, l'âge, l'immortalité '. Cette iconographie pourrait avoir inspiré Pietro Negri (1635 - 1679) dans une Vanité (Madrid, Prado?) où la figure apparaît entourée des mêmes attributs : chandelle éteinte, sablier, bloc de pierre, serpent se mordant la queue. Longtemps attribué à Bartolomeo Schedone (1578 - 1615), ce tableau a été rendu à Guido Cagnacci par Gnudi en 1937, attribution reprise par Pasini dès 1967. Guido Cagnacci, artiste à la personnalité singulière et indépendante, marquée à la fois par le travail épuré des Bolonais et le réalisme ténébriste caravagesque, a souvent représenté le même modèle, sans doute sa maîtresse, dont on rapporte qu'elle le suivait dans ses périples, déguisée en homme. C'est, semble-t-il, la même personne que l'on retrouve dans la Mort de Cléopâtre du Kunsthistorisches Museum de Vienne, ou dans la Lucrèce du musée des Beaux-Arts de Lyon. On connaît plusieurs répliques de cette composition, à Cesena (Cassa di Risparmio), à Andalusia (Nelson Shaks Collection), à Sacramento (Crocker Art Gallery) et dans une collection privée à New York. La version d'Amiens serait à dater, selon Delenda, vers 1640, celles de Cesena et d'Andalusia devant être placées respectivement vers 1645 et 1655. Notice de Matthieu Pinette
propriété de la commune, don manuel, Amiens, musée de Picardie
1890
Collection privée, Lavalard, Frères, 1890
Paris, Grand Palais, Seicento. Le siècle de Caravage dans les collections françaises, 1988-1989. (pp. 138-139, n° 27 (notice d'Odile Delenda)) Caen, musée des Beaux-Arts, Les Vanités dans la peinture au XVIIe siècle. Méditation sur la richesse, le dénuement et la rédemption, 1990. (pp. 204-205, n° F. 55 (notice d'Alain Tapié)) Amiens, musée de Picardie, Couleurs d'Italie. Peintures méridionales des musées d'Amiens, 1998-1999. (pp. 5, 10 (notice de Matthieu Pinete)) Mexico, Museo nacional de San Carlos, Maria Magdalena : éxtasis y arrepentimiento, 2001.
Catalogue des tableaux composant la collection Lavalard Frères de Roye au musée de Picardie, Amiens, 1894. (p. 49, n° 232 (Schedone)) Catalogue descriptif des tableaux et sculptures du musée de Picardie, Amiens, Impr. Piteux Frères, 1899. (p. 239, n° 233 (Schedone)) Catalogue descriptif des tableaux et sculptures du musée de Picardie, Amiens, Impr. Picarde, 1911. (p. 146, n° 229 (Schedone)) Lecuyer R., ' Regards sur les musées de province ', L'Illustration, 2 janvier 1932, p. 18. ((Schedone)) Gnudi Cesare, ' Note sullo stile di Guido Cagnacci ', Rivista del comune, Bologna, 1937. (p. 3) Buscaroli Rezio, Guido Cagnacci, Forli, 1962. (p. 75) Bottari Stefano, ' Per Guido Cagnacci ', Arte antica e moderna, 1963, n° 24. (p. 323) Pasini Pier Giorgio, ' Note e aggiunte a Guido Cagnacci ', Bolletino d'arte, 1967, pp. 78-89. (p. 84 et note 43) Foucart (Borville) Jacques, Les Lavalard, Amiens, 1977. (p. 46, n° 229) Auffrey Isabelle, Catalogue des tableaux italiens du musée d'Amiens, mémoire de maîtrise d'histoire de l'art et archéologie sous la direction d'Antoine Schnapper, 1982-1983. (pp. 19-20) Delenda Odile et Melnotte C., L'Iconographie de sainte Madeleine après le Concile de Trente. Essai de catalogue des peintures des collections publiques françaises, thèse de l'école du Louvre sous la direction de Jean-Pierre Cuzin, Paris, ms, 1985, 5 vol. (II, (1), pp. 111-112, n° 83 bis) Delenda Odile, ' Une allégorie du temps qui passe de Guido Cagnacci au musée d'Amiens ', Gazette des Beaux-Arts, juillet-août 1986, pp. 1-6. (pp. 1-6) Bologne, Pinacoteca Nazionale, Nell'età di Corregio e dei Carraci, 1986-1987. (p. 396 (notice de G. Feigenbaum)) Florence, Palais Pitti, La Maddalena tra Sacro e Profano, 1986. (p. 196 (notice d'Odile Delenda)) Pasini Pier Giorgio, Guido Cagnacci, Rimini, 1986. (pp. 217-219, 257, n° 27) Brejon de Lavergnée Arnaud et Volle Nathalie, Musées de France. Répertoire des peintures italiennes du XVIIe siècle, Paris, 1988. (p. 64) Milantoni Gabriello, dans Negro E. et Pirondini M., La scuola di Guido Reni, Modène, 1992. (p. 94) Huchard Viviane, Lernout Françoise, Mahéo Noël et Couderc Sylvie, Le musée de Picardie, Amiens, Paris, 1995. (p. 85) Tapié Alain, Le Sens caché des fleurs. Symbolique et botanique dans la peinture du XVIIe siècle, Paris, 1997. (pp. 74, 77-78, 150) Pinette Matthieu, Couleurs d'Italie, couleurs du Nord. Peintures étrangères des musées d'Amiens, 2001, musée de Picardie / Somogy éditions d'art, (280 p. ; ouvrage accompagné d'un CD-Rom contenant l'intégralité des notices). (pp. 84-85, ill.)