Église
Saint-Aubin
Ancienne église collégiale Saint-Aubin
Pays de la Loire ; Loire-Atlantique (44) ; Châteaubriant ; 19 rue Basse
Bretagne
En ville
4e quart 12e siècle ; limite 13e siècle 14e siècle ; 2e moitié 15e siècle ; 1ère moitié 16e siècle
2e moitié 19e siècle
1541
Porte la date
Attribution par source
Les fouilles archéologiques menées en 1899 sous le dallage de la collégiale laissent entrevoir l´existence d´un lieu de culte dès l´époque mérovingienne. Au milieu du 9e siècle, le cartulaire de Redon mentionne l´église de Guérande, où sont conservées les reliques de saint Aubin, évêque d´Angers. Le chapitre, qui faisait remonter sa fondation au roi Salomon (857-874), avait à sa tête un prévôt dont l´existence est attestée à la fin du 13e siècle : il avait le droit de porter mitre et crosse, insignes dont les représentations sculptées ornaient l´édifice avant la Révolution. Longtemps disputé entre les évêchés de Vannes et de Nantes, le pays guérandais relève sans conteste de ce dernier au 11e siècle. Le commerce du sel assure déjà sa prospérité, et contribuera à la reconstruction de l´église, à partir de la fin du 12e siècle. Les quatre premières travées de la nef appartiennent à cette campagne, qui relève de l´art roman tardif.. Une deuxième tranche de travaux est lancée vers la fin du 13e siècle : la nef est prolongée d´une travée vers l´est, ses parties hautes modifiées et on entreprend la construction d´un transept dont la croisée devait servir de socle à une tour. La reconstruction du choeur semble avoir été entamée à la même époque, si l´on en juge d´après les baies du bas-côté nord. C´est sans doute à la première moitié du 14e siècle qu´il convient d´attribuer l´édification des deux salles superposées à l´angle du bras sud du transept et du choeur. Si la ville souffre de la guerre de Succession, rien ne prouve que la collégiale fît partie des cinq églises brûlées en 1342 par les troupes de Louis d´Espagne, dont parle Froissart, et c´est sur le grand autel de Saint-Aubin qu´est juré en 1365 le premier traité de Guérande, qui met un terme temporaire aux hostilités. Toutefois, les lettres d´indulgence octroyées en 1372 par Grégoire XI aux fidèles qui concourront au rétablissement du culte dans l´église évoquent les réparations importantes que celle-ci nécessite.. L´activité architecturale, particulièrement intense dans la seconde moitié du 15e et jusqu´au milieu du 16e siècle, entraîne la reconstruction du choeur canonial sur un plan ambitieux et la reprise de la croisée et des parties hautes du bras nord du transept, dont une sablière porte le millésime 1541. En 1515, le pape Léon X, à la demande de la reine Claude de France, accorde des indulgences pour rebâtir la tour, récemment écroulée, qui servait d´amer aux navigateurs. Ces divers travaux sont facilités par le don fait en 1523 par le roi François Ier d´une somme de 500 livres tournois. Le chantier doit toucher à sa fin en 1541, date portée sur la charpente de la nef. Le 16e siècle voit en outre l´adjonction de chapelles latérales (deux au nord et trois au sud) édifiées par des familles nobles de la contrée. En 1705, un ouragan abat le campanile et endommage les couvertures et les vitraux. On refait la charpente du transept entre 1756 et 1764. La période révolutionnaire est marquée par la destruction de la statuaire des portails en 1794.. Saint-Aubin figure précocement sur la liste des édifices classés, mais l´administration laisse une grande liberté au conseil de fabrique. Ainsi, en 1865, l´architecte départemental G. Bourgerel propose à celui-ci une restauration de ce qui a dû exister primitivement pour les douze fenêtres hautes du choeur, qui reçoit des voûtes de pierre à l´initiative de l´abbé Plormel, recteur de 1861 à 1890. En 1872, une flèche néogothique est lancée sur le pignon ouest. En 1874, un ouragan renverse les quatre clochetons des angles et ébranle les nouvelles maçonneries, tandis que le mur du 16e siècle, trop faible pour résister à la charge, se lézarde de façon si alarmante que l´administration locale doit en exiger la démolition. Cette opération est en cours quand, le 28 novembre 1876, la façade occidentale s´écroule, endommageant la première travée de la nef et le bas-côté nord. La reconstruction est entreprise en 1881 par l´architecte diocésain E. Boismen, avec un cahier des charges imposant pour le remontage des parties hautes le respect du style du reste de la façade. Les voûtes en pierre de la nef sont réalisées dans la continuité de ces travaux, contre l´avis de la Commission des Monuments historiques qui avait demandé à plusieurs reprises que les voûtes en tuffeau ne soient point exécutées et que la charpente en bois existant déjà dans une partie de l´église soit continuée, avec voussure lambrissée. L´édifice fait l´objet d´une consécration en 1885. Ses abords sont dégagés au début du 20e siècle et, en 1903, l´architecte en chef Déverin élève sur la croisée du transept un clocher et une flèche neufs, qui seront remaniés en 1965.
Plan en croix latine
3 vaisseaux
Voûte d'ogives
Toit à longs pans
. Plan et ordonnance intérieure. L´église s´impose comme un des plus grands édifices du diocèse, sinon de la province. En plan, la nef et le chœur, de longueur sensiblement égale, s´équilibrent de part et d´autre d´un transept, saillant à l´origine, aujourd´hui engoncé dans un ensemble de chapelles adventices. Le choeur des chanoines était fermé par un jubé, supprimé en 1804. Les quatre travées occidentales de la nef, de la fin du 12e siècle, présentent une succession de grands arcs brisés à double rouleau retombant alternativement sur des colonnes cylindriques et sur des faisceaux de huit colonnes. Les parties hautes ont été malheureusement altérées par la création des voûtes d´ogives en tuffeau dans les années 1880, si bien que le parti originel demeure incertain. Un relevé de 1865 montre néanmoins, au-dessus d´un large pan de maçonnerie délimité par deux bandeaux, une coursière ménagée dans l´épaisseur du mur gouttereau sud de la nef, ouvrant sur celle-ci par deux arcades tréflées et sur l´extérieur par des petites baies de même tracé, attestant que les parties hautes ont subi une surélévation à la fin du 13e ou au début du 14e siècle. Boismen a systématisé ce dispositif en ouvrant dans chaque double travée un triplet éclairant directement la nef. Les vues intérieures anciennes montrent la nef et le choeur couvert d´un lambris en berceau brisé à entraits et poinçons, la croisée du transept d´un simple plafond. Au-dessus des voûtes modernes, subsiste l´essentiel de la charpente du 16e siècle, et notamment des sablières où triomphe le répertoire de la Renaissance.. La dernière travée de la nef vers l´est, plus large et plus élevée que les précédentes, est contemporaine de la modification des parties hautes du vaisseau central, vers la fin du 13e siècle. Le grand arc sud et celui qui, du même côté, fait communiquer le bas-côté avec le transept, avec leurs ressauts chanfreinés, leurs chapiteaux à corbeille lisse d´inspiration anglaise relèvent de la même esthétique que le choeur de Saint-Sauveur de Redon, achevé autour de 1300. La porte qui, dans le bas-côté, donne accès à l´escalier en vis desservant les combles, a une forme trilobée aux cintres très surbaissés identique à celle des baies du triforium de l´abbatiale bénédictine. Assise sur un socle octogonal, la pile sud-ouest de la croisée, qui se compose d´un faisceau de seize colonnes polygonales inscrit dans une forme générale losangée, appartient à cette campagne. Ses proportions considérables s´expliquent par le projet d´asseoir sur la croisée une tour de maçonnerie. Le mur du collatéral nord du choeur dont les baies, pour la plupart occultées par la construction de la sacristie au 19e siècle ou murées, présentent les profils à double rouleau chanfreiné caractéristiques, pourrait avoir été monté au même moment, d´autant que l´une d´entre elles conserve une verrière illustrant la vie de saint Pierre, dont certains panneaux remontent au 14e siècle. En revanche, du côté nord, le grand arc de la dernière travée de la nef présente des moulures à pénétrations semblables à celles du choeur et a donc été repris à la fin du 15e siècle, comme ceux de la croisée.. Sur le flanc sud du choeur, à l´est du transept, s´ouvre une chapelle basse de forme rectangulaire, qualifiée de salle capitulaire ou de crypte. Elle présente une esthétique assez différente de la dernière travée de la nef et peut avoir été bâtie vers le milieu du 14e siècle. Au centre, une pile fasciculée, dont les colonnettes sont couronnées de chapiteaux ornés de feuilles de chêne, reçoit la retombée de voûtes d´ogives plates, qui constituent un unicum dans la région. Dans son mur est, on voit une grande baie en arc brisé, à ébrasement profond, murée au 16e siècle lors de la construction de la chapelle voisine, et une armoire eucharistique. Elle est surmontée d´une salle haute, probablement à usage de trésor à l´origine mais qualifiée de salle du chapitre au 18e siècle, éclairée au sud par deux baies en arc brisé dans lesquelles ont été ménagées tardivement des fenêtres rectangulaires.. Le choeur, surélevé de trois marches par rapport à la nef, présente un rétrécissement prononcé d´ouest en est, qu´on peut interpréter comme une recherche illusionniste, à moins qu´il ne corresponde à la réutilisation des fondations d´un choeur roman, comme on le voit à la fin du 13e siècle à Redon. Le vaisseau central est séparé des bas-côtés par six grandes arcades à moulures prismatiques retombant en pénétration dans des piles octogonales. Dans l´axe des supports, entre les fenêtres hautes, des culots en granit recevant des tas-de-charge, parfaitement lisibles sur les relevés de 1865, témoignent d´un projet de voûtes abandonné en cours de chantier. Le restaurateur du 19e siècle les a utilisés pour asseoir ses voûtes d´ogives en tuffeau.. Ordonnance extérieure . Bâtie sur le point haut du site urbain, dominant de loin tout le pays guérandais, la collégiale présente une silhouette complexe, reflet d´une histoire architecturale qui s´étend de l´époque romane tardive à la fin du 19e siècle. En dépit des travaux drastiques des années 1880, qui ont accentué son élan vertical, la façade occidentale reste un morceau d´architecture de premier ordre, dont la restauration a globalement respecté les dispositions d´origine. Seul le beffroi central, couronné d´une flèche néogothique, a fait l´objet d´une restitution aléatoire, qui rappelle la silhouette de la façade ouest du Kreisker, à Saint-Pol-de-Léon. L´ouvrage d´origine avait été bâti vers 1520 et remonté après 1705. Cette façade, avec la superposition dans une même embrasure d´un portail géminé et d´une grande baie vitrée, inscrit Guérande dans une famille d´édifices bretons, mais aussi angevins, tourangeaux et poitevins, des dernières années du 15e et de la première moitié du 16e siècle. Les vues anciennes montrent toutefois une baie murée, le remplage actuel n´ayant été mis en place et doté d´un vitrail qu´en 1884. Dans l´épaisseur du contrefort sud est ménagée une chaire extérieure à laquelle on accède depuis l´intérieur de l´édifice par un escalier en vis. Ce dispositif peu fréquent reprend une formule inaugurée à la cathédrale de Nantes, et qu´on retrouve à Vitré et à Saint-Lô.. Au nord de la collégiale, s´étendait un cimetière clos. En conséquence, cette élévation latérale est d´une grande sobriété, rythmée de contreforts et percée d´un simple portail dans la quatrième travée de la nef. Au contraire, le côté sud, tourné vers la place Saint-Aubin, offre un aspect ostentatoire, avec une succession de pignons de hauteurs variées. Le porche dit du baptistère servait de lieu de réunion au conseil de fabrique. Bâti au début du 16e siècle, il est couvert d´une voûte d´ogives en tuffeau sur un soubassement en granit et a reçu un décor sculpté Renaissance, très restauré au 19e. Le portail est surmonté d´un tympan vitré. Le porche et la chapelle qui le jouxte à l´est, dédiée à Sainte-Marguerite, sont encadrés par des contreforts à 45°, amortis par des pinacles reliés aux rampants de leurs pignons respectifs par des éléments de balustrades ajourés de quatre-feuilles et par de gracieux arcs-boutants miniaturisés rappelant ceux du chevet d´Hennebont, édifié à la même époque. Dans l´angle formé par la chapelle et le bras sud du transept, s´élève une tour d´escalier carrée correspondant à la campagne de la fin du 13e ou du début du 14e siècle, à laquelle appartiennent également les maçonneries du transept voisin, cantonné de contreforts droits. En revanche, le grand fenestrage gothique qui éclaire celui-ci est une création du 19e siècle : l´iconographie ancienne montre en effet un remplage strictement orthogonal, analogue à celui encore en place dans la chapelle Sainte-Marguerite. Le garde-corps à motifs de trilobes retournés qui court à la base du pignon du transept garnissait autrefois le haut des murs gouttereaux du vaisseau central de la nef, où les restaurateurs du 19e siècle lui ont substitué une balustrade quadrilobée. En 1865, le restaurateur a plaqué sur les contreforts flamboyants du choeur, amortis par des pinacles, des arcs-boutants destinés à épauler ses voûtes de pierre.. Encadré par de puissants contreforts angulaires allégés par des niches en accolade superposées et amortis par des pinacles, le chevet est le morceau le plus original du monument, avec la haute fenêtre qui occupe la quasi-totalité du mur droit du choeur, et les bas-côtés terminés par des pans coupés. La rencontre de ceux-ci avec la couverture en appentis du collatéral détermine un volume prismatique bien conforme au goût du Moyen Âge finissant. La formule se retrouve à l´identique dans la petite chapelle Notre-Dame-du-Mûrier au Bourg-de-Batz, achevée en 1478, sans que l´on puisse dire dans lequel de ces deux édifices elle a été élaborée. Si l´on admet que c´est bien la grande collégiale guérandaise qui a servi de modèle, la conception du chœur de celle-ci devrait alors être placée dans le troisième quart du 15e siècle.
classé MH
Eglise Saint-Aubin (ancienne collégiale) : classement par liste de 1840.
Propriété de la commune
1992
(c) Monuments historiques
1986
Bonnet Philippe
Dossier individuel
Région Bretagne - Service de l'Inventaire du Patrimoine Culturel - 283 avenue du général Patton - CS 21101 - 35711 Rennes Cedex 7 - 02.22.93.98.35