Tableau
Saint Sébastien secouru par les saintes femmes
Tableau : saint Sébastien secouru par les saintes femmes
Auvergne-Rhône-Alpes ; Ain (01) ; Nantua ; église Saint-Michel
01269
Anciennement région de : Rhône-Alpes
Nantua
Église Saint-Michel
PA00116440
Choeur
Peinture
Rectangulaire horizontal
Toile (support) : peinture à l'huile ; bois (cadre) : doré
Le cadre est assemblé par 4 traverses coulissantes dans les angles numérotées de I à IV; 3 étiquettes collées au revers indiquent les expositions de Paris, Zurich et Tokyo ; 8 petites pattes métalliques en équerres vissées au revers du cadre fixent le châssis.
Saint Sébastien ; sainte Irène
Saint Sébastien est abandonné après son martyre au pied de l'arbre où les bourreaux l'avaient attaché. Tandis que les soldats s'éloignent, des saintes femmes s'apprêtent à lui rendre des devoirs pieux. L'une d'elles, la veuve Irène, retire de ses blessures les flèches qui le transpercent.
H = 213 ; la = 278 ; dimensions de la toile ; dimensions hors tout : h = 272 ; la = 336 ; pr = 25; dimensions de la caisse de transport : h = 283 ; la = 353 ; pr = 42
Bon état
Restauration de la toile et du cadre en 1991 au Centre régional d'Etudes et de Traitement des Oeuvres d'art (CRETOA) : toile par M. Jacques Grasset : voir détails de la restauration sur la fiche 1TRMH399 ,remise en état du cadre par Mme A.-L Lagron et M. Duvieuxbourg ; voir constats d'état établis à l'occasion des expositions à Madrid et Barcelone 2011 et 2012
Signature ; date (en bas à droite)
Inscription : EUG. DELACROIX 1836
Lieu d'exécution : Île-de-France ; 75 ; Paris
2e quart 19e siècle
1836
Ce tableau, exposé au Salon de 1836 sous le numéro 499, fut acquis pour 3000 francs par l'Etat, puis envoyé en dépôt à l'église de Nantua à la demande du député Girod de l'Ain (AD de l'Ain : série T). Vendu le 12 mai 1869 par le conseil de fabrique à M. Brame pour la somme de 23000 francs pour achever de payer l'orgue, la cour d'appel de Lyon annulera la vente le 21 décembre 1873 au motif que le tableau appartenant au domaine public est inaliénable. Dans l'inventaire des biens dépendant de la fabrique paroissiale de Nantua réalisé le 6 février 1906, le tableau est mentionné dans la rubrique I. Objets mobiliers garnissant l'église paroissiale, dans la nef nord : n? 4/ martyre de st Sébastien, toile, 1836, par Eug. Delacroix (AD de l'Ain. Série V : 8V47). ? Lui seul [Eugène Delacroix], peut-être, dans notre siècle incrédule, a conçu des tableaux de religion qui n'étaient ni vides et froids comme des ?uvres de concours [?] Le Christ aux oliviers, le Saint Sébastien, avaient déjà témoigné de la gravité et de la sincérité profonde dont il sait les empreindre. ? C'est ainsi que Baudelaire évoque le tableau de Delacroix représentant Saint Sébastien soigné par Irène dans son Salon de 1846, dix ans après son exposition au salon de 1836. Il vante ici l'expression des sentiments qui émanent de l??uvre, au-delà de son sujet religieux, et qui la rattachent au romantisme qui ? n'est précisément ni dans le choix des sujets, ni dans la vérité exacte, mais dans la manière de sentir ? (Baudelaire, Salon de 1846). À l'heure du renouveau de la peinture religieuse, qui répond à la nécessité de meubler les églises dépouillées à la Révolution autant que les nombreuses églises édifiées au cours du XIXe siècle, Delacroix a fourni assez peu de sujets religieux, mais il a su y apposer le sceau du romantisme en s'éloignant des représentations académiques empreintes d'une froide solennité pour y introduire le mouvement de l'âme. Artiste cultivé, Delacroix n'a pu ignorer en son temps le courant du catholicisme libéral, institué notamment par Félicité de Lamennais, qui a placé la religion au c?ur de la société, et a pu influencer cette représentation d'une religion humanisée. Si le choix du sujet importe moins que la manifestation du sentiment dans la définition du romantisme selon Baudelaire, l'iconographie du martyre de saint Sébastien n'en est pas moins précisément respectée par le peintre. Saint Sébastien, originaire de Narbonne et élevé à Milan, sert comme soldat à Rome, fonction évoquée par le casque et l'épée au premier plan. L'empereur Dioclétien le condamne à être percé de flèches lorsqu'il découvre qu'il est chrétien. Ici, il est représenté après son martyre, au pied de l'arbre auquel il était attaché (parfois remplacé par une colonne), ce dont témoigne encore le lien à sa main droite. Sur le tableau, les bourreaux ayant accompli leur tâche s'éloignent par le chemin représenté en contrebas. Irène, veuve chrétienne vêtue d'un sombre drapé rappelant son deuil, le guérit en lui ôtant ses flèches, accompagnée d'une seconde sainte femme. Cependant, loin de certaines représentations idéalisées du saint aux yeux grand ouverts, qui ne laisse pas transparaître la souffrance, Delacroix exalte le sentiment de douleur à l'aide de procédés formels recherchés. En premier lieu, la composition du tableau en renforce la tension dramatique : la diagonale formée par l'alignement des trois têtes des personnages coupe celle que forme le corps inerte et alangui de saint Sébastien à l'endroit précis du geste d?Irène, qui ôte méticuleusement la flèche de l'épaule du saint. La mise en exergue de ce point douloureux de la scène invite le spectateur à la compassion, au sens étymologique du terme. Les yeux clos du saint et la position d'abandon de son corps, synonymes de mort, s'opposent à l'expression attentive et pleine de pitié d?Irène. Le regard de la seconde femme, plongé dans l'ombre, se tourne avec crainte dans la direction des bourreaux, dans une attitude p roche de la Médée que Delacroix exposera au salon de 1838. ? Chef de l'école moderne ? selon Baudelaire, Delacroix n'en oublie jamais pour autant la tradition, où il puise des références qui sont clairement apparues aux critiques du Salon de 1836. Qualifiée de ? la plus belle page du Salon ? par Théophile Gautier, qui évoque à son sujet Pierre de Cortone et Carlo Maratta, le Saint Sébastien renvoie à la couleur du Titien pour Gustave Planche dans la Chronique de Paris (1836), au dessin de Raphaël et à l'école vénitienne pour Thoré Burger dans Le Siècle (1837). Au XXe siècle, les historiens de l'art sont allés plus loin dans l'exégèse stylistique. Plusieurs ?uvres de Michel-Ange ont été évoquées : la Madone de Bruges et la Nuit de la chapelle Médicis pour les deux femmes, l'Aurore de la chapelle Médicis et l'Esclave mourant pour saint Sébastien. La position des jambes de saint Sébastien, au raccourci osé, a trouvé un parallèle chez Rubens dans une Lamentation (1614, Vienne), et surtout une Trinité (1620, Anvers) dont Delacroix a effectivement laissé des dessins certainement d'après gravure.La multiplicité de ces sources d'inspiration ne saurait enlever à Delacroix l'originalité de sa manière, servie par une maîtrise technique remarquable dans l'usage habile du raccourci et le jeu subtil des ombres. Il produira six variantes sur le même sujet, dont un tableau exposé au Salon de 1859. Le tableau de Nantua présente cependant une histoire particulière. Acheté par l'État pour 3000 francs au Salon de 1836, il est envoyé en dépôt dans l'église Saint-Michel de Nantua en 1837 à la demande du député Girod de l'Ain. Est-ce en raison de la nudité de l'épaule d'une des femmes ou celle du saint Sébastien (qui n'est pas sans évoquer l'attitude du faune Barberini), ou bien pour achever de payer l?orgue, que la fabrique décide de vendre l??uvre en 1869 à un certain M. Brame pour 23 000 francs ? La commune s'oppose à cette vente, qui sera annulée par la Cour de Lyon au motif que le tableau appartenant au domaine public est inaliénable. Le Louvre essaiera ensuite à plusieurs reprises de se l'attribuer, arguant des mauvaises conditions de conservation dans l'église de Nantua : lors de la présentation du tableau à l'Exposition universelle de 1900 notamment, le musée propose d'échanger le Delacroix contre un Christ en croix de Philippe de Champaigne, mais il se verra toujours opposer un franc refus de la part de la commune de Nantua, qui n'a jamais voulu déparer l'église de son chef d'?uvre, revendiquant son ? droit à la beauté ?. (source Cécile Oulhen)
Propriété de l'Etat
Classé au titre objet
1903/10/15 : classé au titre objet
Propriété de l'Etat ; dépôt du FNAC
'Centenaire de la mort d'Eugène Delacroix', Musée du Louvre, Paris, 1963 ; 'Eugène Delacroix', Kunsthaus de Zürich du 5 juin au 23 août 1987 ; 'Delacroix et le romantisme français', Tokyo, 1989,Catalogue de Jacques Thuillier ; 'Trésors de l'Ain, Objets d?art du Moyen Âge au 20e siècle', Monastère royal de Brou à Bourg-en-Bresse du 26 février 2011 au 29 mai 2011 ; 'Delacroix - De l'idée à l'expression (1798-1863)', Fondation la Caixa à Madrid (18 octobre 2011 - 15 janvier 2012), puis Barcelone (14 février - 20 mai 2012).
Richesses touristiques et archéologiques du canton de Nantua 1991.
AD de l'Ain : série T ; AD de l'Ain. Série V : 8V47 ; Textes critiques des Salons et autres écrits esthétiques de Gautier transcrits par Carine Dreuille, dans le cadre d'un mémoire de maîtrise préparé à l'Université Paul Valéry de Montpellier en 1999 sous la direction de François Brunet ; Grasset, Jacques, de, Rapport de restauration, 1994 ; ; Base de données CAOA 2016 ; 1OM1675
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Dossier individuel
2003
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